Nous roulons bon train vers l’Est sur l’excellente
route traversant longitudinalement le plateau du Capaddoce. Devant nous s’étale
une vaste plaine verdoyante bordée de moyennes montagnes aux sommets encore enneigés.
Entre les parcelles agricoles, de majestueux peupliers, comme si les hommes
avaient voulu agrémenter ce paysage tout en profondeur d’une note de
verticalité. Peut-être aussi pour impressionner les commerçants empruntant
cette route de la soie, fil d’Ariane entre l’Asie et l’Europe.
Même si les temps ont bien changé, à l’époque
du transport aérien et de l’économie numérique, le lien existe
toujours pour les échanges de certaines marchandises. Les camions ont succédé
aux animaux de bâts. Le chemin est maintenant une large route au long de
laquelle les caravansérails sont devenus des garages-stations-services pour
poids lourds, restaurants et hôtels bon marchés pour les chauffeurs. C’est
aussi le lieu de commerce et de rencontre des paysans et bergers du secteur, le
genre de lieu où il fait bon s’arrêter respirer toute cette agitation. Nous en
profitons pour faire le plein et la halte déjeuner dans une gargote prisée par
ces gens rudes et authentiques toujours curieux de connaître notre destination,
eux pour qui l’Eldorado est plutôt à l’Ouest. Alors à quoi bon aller perdre son
temps dans le Caucase ?
La large vallée se rétrécie doucement
et la route grimpe régulièrement pour franchir un premier col à plus
de 2000 mètres. Ma moto marche mal. De nombreuses ratées doublées de
désagréables pertes de puissance. A l’arrêt suivant je consulte Djo pour qui la
réponse est évidente : les effets de l’altitude. J’avoue ne pas être
totalement convaincu (plus exactement satisfait) mais n’ai pas de meilleurs
argument. Nous en profitons pour refaire le plein et prendre un nouveau café
dans un gourbi au centre du village. Au beau milieu d’une salle crasseuse trône
un poêle sur lequel est posé un samovar en cuivre. Tout autour, des tables où
sont assis des hommes brins au cheveux brillants, barbus, la peau tannée. Tandis
que l’on nous dévisage, un homme à l’air affable nous invite à boire un thé. Moment
d’échange agréable dans un anglais approximatif mais volontaire, avec ce
vétérinaire venu travailler ici près des éleveurs des hauts plateaux. Il est
heureux, même si sa famille réside à Istanbul. Sous l’œil bienveillant du
patron, avec un certain succès un cireur de chaussures propose ses services aux
clients.
L’après-midi avance. Il est temps de
repartir. Sous un ciel menaçant, nouveau col à 2400 m. La moto marche de
nouveau normalement. Sans doute l’essence.
Nous terminons à Oltu à la nuit tombante.
Comme tous les soirs depuis que nous sommes entré en Turquie, l’orage menace.
Le temps de trouver un hôtel minable est c’est le déluge. Seuls les chiens errants
restent se faire tremper, molosses assez impressionnants ayant fort mauvaise
réputation auprès des marcheurs.
Demain nous devrions entrer en Géorgie.
La Caucase approche à grands pas.
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