dimanche 23 septembre 2012

Success Story à la sauce Chinoise



Bangkok – Pékin, vu d’ici la porte à côté, vu de là-bas un vol de 5h vers le Nord-Est au dessus de la Thaïlande, le Laos, Vietnam puis une longue diagonale sur la Chine ; en fait la même distance que de Paris à Moscou…
Notre rendez-vous du jour est avec « une vieille connaissance », une entreprise dont j’avais rencontré le patron il y a une quinzaine d’année dans la province du Sichuan au centre du Pays. Nous avons dans les mêmes âges, et tandis que nous lancions notre opération canards en Chine, il dirigeait alors une « simple usine » de production d’aliment pour porcs. Je me souviens parfaitement de ce contact agréable avec un homme entreprenant et plein d’ambitions pour sa nouvelle compagnie « New-Hope » (« nouvelle espérance » en français). Nous n’avions alors pas fait d’affaire ensemble.

Le mois dernier je suis étrangement appelé par une banque d’affaire britannique pour un contact avec une mystérieuse entreprise Chinoise. De fil en aiguille on finit par m’annoncer le nom de la société en question : « New-Hope ». Tiens, tiens… Le mandat confié à une équipe de conseil est de trouver des partenaires pour leurs projets d’expansion à l’international.

La rencontre se déroule à Pékin dans une tour ultramoderne des récents quartiers d’affaires de la capitale. Accueil chaleureux. Monsieur Liu Yonghao le grand patron n’est pas présent – mais je l’ai aperçu jetant un œil intéressé dans la salle de réunion – et c’est une jeune équipe de cadres et conseillers qui nous reçoivent.
La séance démarre par une présentation croisée des deux groupes aujourd’hui. En dix ans seulement New-Hope est devenue une entreprise gigantesque : 3ème producteur mondial d’aliment du bétail, plus de 80 000 employés et un chiffre d’affaires de 7 milliards d’euros ! Des chiffres qui donnent le vertige.
A l’évidence nous ne sommes plus dans la même dimension, comme si pour eux le temps s’était accéléré et que, malgré notre belle croissance également, nous en étions restés à l’aviation des pionniers quand, dans le même temps ils avaient franchi le mur du son dans un marché Chinois en pleine explosion où les plus entreprenants ont écrit quelques belles « success stories ». Aujourd’hui parfaitement lucide sur les atouts de son groupe devenu une puissance économique de l’Empire du Milieu, mais aussi sur ses limites très chinoises, Monsieur Liu veut le propulser dans une nouvelle dimension et le challenge est de taille, car il s’agit d’intégrer d’autres réalités du monde extérieur auxquelles ses équipes n’ont pas encore été réellement confrontées.
Nos atouts ? La technologie et l’international. La partie qui va se jouer promet d’être passionnante.

samedi 22 septembre 2012

Ce que veulent les femmes...



Tandis que nos « négociations Suisses » se poursuivent, me voilà projeté en express vers l’Asie à la faveur de la demande urgente d’un important prospect manifestement intéressé par nos produits. Y aller ou pas ? Bouleverser un programme déjà bien rempli pour donner priorité à l’action commerciale, et tenter d’établir des relations personnelles peut-être décisives dans un contexte économique tendu où aucune opportunité ne peut-être négligée. Oui évidemment, seulement c’est à l’autre bout du monde. Et comme rien ne remplace encore un premier « contact physique » pour créer la confiance, je n’hésite pas longtemps. Il sera ensuite toujours temps de déléguer d’avantage.
Et c’est donc parti pour un nouveau long vol intercontinental à bord d’un Boeing triple 7 - 300 flambant neuf d’Air-France piloté par un commandant sympathique, visiblement passionné par son métier, et dont la bonne humeur rayonne positivement sur tout l’équipage commercial.
12h plus tard je retrouve l’ambiance moite de Bangkok au petit matin en heure locale, pour moi encore le milieu de la nuit ; pas le meilleur moment.
Le temps de déposer les valises à l’hôtel, prendre une douche bienfaisante, et nous partons en voiture dans ce cloaque de circulation automobile qu’est Bangkok, malgré les travaux titanesques effectués ces dernières années avec maintenant, au dessus des maisons basses « traditionnelles », un dense réseau d’autoroutes aériennes qui s’enfilent entre les buildings modernes en offrant des perspectives urbaines spectaculaires, comme si l’on volait à une vingtaine de mètres en décrivant de jolies courbes au dessus de la ville. Rien d’autre à faire que de prendre son mal en patience en transpirant sur les sièges en skaï usé d'un taxi à bout de souffle.
Nous nous présentons au bureau de notre contact, mais notre hôte a décidé de nous recevoir à la maison. Plutôt de bon augure.
Quelques kilomètres plus loin nous entrons dans un quartier résidentiel cossu après avoir franchi la barrière sous bonne surveillance. Puis la voiture s’engage dans une longue allée bordée de plantes fleuries luxuriantes aux couleurs jaunes et rouge du plus bel effet. Au bout de l’allée une grande batisse devant laquelle un garage abrite pas moins d’une dizaine de voiture de luxe. Ca fait toujours son effet !
En sortant du taxi je fais un rapide panoramique des lieux. Nous sommes dans un grand parc arboré, en plein cœur de la ville, où se nichent plusieurs maisons. Non loin de la maison de maître devant laquelle nous sommes arrêtés, une grande salle vitrée, sorte d’aquarium climatisé donnant sur le jardin au seuil duquel une petite dame nous fait signe d’avancer. En approchant je découvre notre hôtesse, la soixantaine sophistiquée, grosses bagues aux doigts et, sous une épaisse et volumineuse chevelure brune, un visage apprêté, joufflu, aux lèvres soigneusement rougies, illuminé d’un regard volcanique qui en dit long sur sa détermination. Sont allure me fait immédiatement penser à Imelda Markos en espérant que la comparaison ne s’arrête qu’à une vague ressemblance physique.
A l’évidence le rendez-vous est important pour les deux parties et il ne s’agit pas de louper le coche. Elle sait que nous arrivons à l’instant de France et fait preuve d’une attention bienveillante, offrant de délicieux jus de fruits frais, café, thé, avec quelques Viennoiseries. Madame est accompagnée de son fil, sa belle fille et quelques conseillers techniques. Sans plus de préalable nous entrons dans le vif du sujet…
La discussion se déroule rondement, droit au but sur les intérêts mutuels d’un accord commercial. Notre proposition est claire, créative, dans un esprit gagnant-gagnant rapidement intégré par nos interlocuteurs. Tandis que nous entrons dans des détails techniques, Madame se met à l’écart pour un conciliabule avec un homme de confiance. Dix minutes plus tard elle revient tout sourire. J’ai alors la conviction que le deal est fait, même si rien n’est encore définitivement confirmé, validant du même coup l’opportunité de ce déplacement express à l’autre du bout du monde.

dimanche 9 septembre 2012

Terrain neutre

L'hôtel de mon rendez-vous est un est endroit charmant, grande bâtisse dans le plus pure style un peu austère de la Suisse alémanique, large façade grise sans fioriture sur trois étages, au pied de laquelle, derrière une grille de fer forgé bordant la rue où circulent voitures, vélos et tramways, se niche une étroite terrasse pavée sur laquelle quelques habitués confortablement installés dans des chaises en osiers sirotent café ou thé en tapotant sur des tablettes électroniques. Il y a là aussi, profitant des caresses adoucies du soleil de cette fin d’été, un groupe de musiciens accompagnés de leurs précieux instruments dans des boites aux formes sensuelles.

On entre dans "la maison" par une lourde porte de bois vitrée derrière laquelle un couloir carrelé style années 30 conduit à un large escalier de bois tournant autour d'une rutilante rampe cuivrée. Sur la gauche une très jolie salle de bar – parquet impeccablement ciré – au fond de laquelle, derrière un zinc imposant, une collection de whiskies est mise en valeur sur de fines étagères de verre devant un mur miroir renvoyant joliment la lumière diffractée par les nombreuses bouteilles du précieux breuvage.
En montant à l'étage on rejoint un petit palier orné d'œuvres d'art contemporaines – peintures, sculptures, mobiles – agencées avec gout.
Un jeune serveur noir aux allures d'adolescent m'accueille courtoisement et me conduit à la salle de réunion. Son fort accent Suisse doux et trainant est quelque peu inhabituel pour son type africain.
Je suis légèrement retard du à un vol décalé et mes correspondants m'attendent en avalant des sandwiches, tasse de café à la main.
Malgré les apparences, la tension est palpable pour cette importent négociation aux perspectives pleines de promesses dans un contexte économique tendu. Il y a là un américain, un allemand et un collègue français. Je referme la porte derrière moi.
Organisée en terrain neutre la partie va être serrée.