vendredi 23 mai 2014

Idéal Européen



Dans les allées bondées, sacs publicitaires à la main, des gens du monde entier vont et viennent sous les spot-lights éblouissants. En fixant un point précis on croise du regard tous ces visages curieux ne sachant parfois pas où donner de la tête tant les « boutiques » rivalisent d’imagination pour attirer le chaland. Un jour je resterai comme cela en planque, simplement armé d’un téléobjectif, à prendre des instantanés pour fixer la beauté de la diversité humaine : des femmes et des hommes de toutes origines venus ici faire des affaires. Nous ne sommes pas dans la zone duty-free d’un aéroport international mais sur un important salon professionnel aux Pays-Bas.
Organisation parfaite et rigueur caractérise ce petits pays de commerçants tellement adaptables mais aussi d’une rigidité presque parfois « brutale » dans la relation. Aussi agaçante pour nous français que notre côté latin-râleur peut l’être pour nos voisins.
Toujours amusant de constater cette diversité Européenne : rigueur Germanique, froideur apparente de Scandinaves, fierté Russe, flegme Britannique, fantaisie Italienne, chaleur Espagnole, autant de différences qui fond la richesse de notre continent.
J’accueille justement un client-ami Hollandais. Nous parlons affaires bien sûr. Puis la conversation dévie sur la situation économique générale difficile que traverse le Vieux Continent et dont les effets nous inquiètent. Plus précisément le populisme, la montée des extrêmes, et le remise en cause de l’idée Européenne par certains de nos concitoyens communautaires durement touchés pas la crise.
Nous poursuivons notre échange sur les élections Européennes du week-end prochain en constatant le risque important de rejet des partis traditionnels. Certes ils ne sont pas totalement innocents de cette situation économique dépressive. La grande vague de la mondialisation bien souvent les dépasse et leur influence reste limitée. Mais les partis traditionnels et leurs leaders sont devenus bouc émissaires d’une situation de transition de société difficile, faute parfois de consistance dans leurs actes politiques où l’ambition personnelle et le court termisme l’emportent trop souvent sur l’intérêt général. Et peu de pays échappent à cette dérive.
Pour autant nous nous accordons que le fait que, vote dit de "protestation", et repli sur soit, ne peuvent être une alternative. Ils auraient pour effet collatéral de propulser aux responsabilités Européennes des gens qui n’aiment pas l’Europe et en détruiraient l’idéal. Celui-là même qui nous a amené paix et prospérité depuis presque 70 ans. Consternant et risqué. Et ce dire que nous devrions nous engager pour promouvoir ces valeurs auxquelles nous croyons.
-      Mais n’est pas déjà ce que nous faisons au sein de nos entreprises, me lance mon ami.
-      Certainement, mais faudrait-il faire plus ?

...
Je termine ces quelques lignes dans mon bureau à la maison, endroit très personnel chargé de souvenirs de voyage.
Posé entre un mug NASA où je mets mes crayons, et un rhinocéros en pierre servant de presse bouquins, un caillou du ballast de la sinistre ligne de chemin de fer se terminant au fond du camp d’Auswitch-Birkenau. Souvenir prélevé là-bas pour ne jamais oublier l’inconcevable « vécu » par nos grands-parents.  Eux aussi étaient des Européens, à une époque pas si lointaine dont les jeunes générations n’ont évidemment pas souvenir.

lundi 5 mai 2014

Off-Road



S'il est agréable de piloter une moto sur la route, le plaisir est décuplé quand on peut en sortir. Et c'est bien l'objectif de cette escapade vers la Sierra de Guara, spectaculaire formation géologique juste de l'autre côté des Pyrénées au nord de l'Aragon.
On rejoint le massif granitique par une très jolie route sinueuse longeant un torrent de montagne aux reflets émeraude.
L'arrivée sur "le spot", est saisissante : impressionnantes falaises roses desquelles se détachent d'étonnantes colonnes, comme des stalagmites géantes où des grimpeurs du monde entier viennent se mesurer.
Didier nous a concocté une grande boucle "off-road" autour du massif.
Précision utile pour les « connaisseurs », nos motos sont de vénérables Honda Africa-Twin, modèles 1987 et 1995. Celle de Didier a fait le tour du monde tandis que la mienne a écumé quelques déserts.

Aux abords du château de Loarre, majestueuse forteresse médiévale parfaitement intégrée dans le paysage avec vue imprenable sur la vallée, nous entamons la piste avec délectation. Debout sur les cale-pieds, le regard loin, nous roulons prudemment dans une vaste sapinière distillant de délicieuses effluves de résine de printemps. En rejoignant le plateau pierreux la végétation devient plus clairsemée. La vue se dégage aussi au dessus des arbustes battus par les vents sur un tapis de bruyère alternativement fuchsia et bleu. Puis la piste devient plus large et le rythme s'accélère au gré de la pression sur la poignée de gaz. En glissade on place alors la moto au millimètre entre les saignées piégeuses, sensation grisante de faire corps avec la machine dans un environnement exceptionnel. Puis les pistes se croisent sans aucune indication. Nous prenons des options "à l'instinct".
Mauvaise pioche… Nous redescendons progressivement dans la foret où la voie se dégrade rapidement pour devenir un mauvais chemin pierreux, boueux, envahit par les ronces. Seulement équipés de pneus mixtes nous poursuivons prudemment, façon trial. Concentrés sur notre progression nous oublions le paysage, totalement absorbés par le pilotage de nos machines sur ce terrain chaotique quelque peu hostile où il s'agit de ne pas faire de faute, au risque d'être immédiatement sanctionnée par une chute. Certes à priori peu dangereuse à ces vitesses réduites, mais blessante pour l'amour propre…
Puis nous remontons entre les arbres pour déboucher sur une jolie clairière tapissée d'un épais gazon naturel.
Retour au calme. Nous stoppons les motos. En sueur enlevons les casques pour contempler, depuis ce belvédère naturel, un panorama à couper le souffle : au nord comme une fine dentelle, l'horizon délimité par la ligne de crêtes des Pyrénées encore enneigée, tandis qu'aux premiers plans se superposent de multiples reliefs aux nuances naturelles parfaitement coordonnées : brun, vert, bleus, gris, sous un ciel bleu intense agrémenté de quelques nuages bourgeonnant.
Vision parfaite, instant magique où l’intensité des émotions conjugue une confusion de sentiments : dépassement de soi, contemplation, communion avec la nature, liberté, amitié.

dimanche 4 mai 2014

Echappée belle



Partir en moto a toujours quelque chose de la conquête de l'ouest, quand les cow-boys chevauchaient vers la terre promise. On enfile la tenue, sangle le sac derrière la selle, met son casque et enfourche la machine.
Les premiers tours de roue sont comme une départ au galop, immédiate sensation de vitesse accentuée par l'effet du vent relatif sur le visage ; et cette indicible sensation de liberté qui envahit immédiatement le "pilote-cavalier", promesse d'une échappée qui sera belle.
Didier et moi filons vers l'Espagne histoire de fuir le mauvais temps. Le sud est souvent synonyme de soleil.

Avec un plaisir non dissimulé nous roulons côte à côte sur l'autoroute, dépassant de concert les voitures familiales partant pour ce week-end prolongé. A travers les fenêtres arrières les enfants nous adressent des petits signes auxquels nous répondons gentiment, tandis que les parents font semblant de ne pas nous voir, peut-être un peu gênés de ne pas (plus) pouvoir en faire autant.  Comme si la moto n'était plus de leur âge. Derrière nos casques il ne voit pas le nôtre...
Nous poursuivons notre chevauchée nocturne sur le long ruban d'asphalte éblouis par les lucioles mécaniques en contre sens. Température agréable de saison rendant cette étape de liaison plaisante au sortir de journées pluvieuses.
Un peu moins de 6 heures pour rejoindre Pau, arrêt dîné compris. 

Nous sommes déjà ailleurs.