vendredi 31 juillet 2015

Le nombril du monde




Devant nous une spectaculaire faille rocheuse s’étire sur des kilomètres, séparant les plaques Eurasienne et Nord-Américaine. L’eau y est si limpide qu’elle semble presqu’absente de cet abysse clair aux reflets métalliques.
A l’est de la saignée, une large plaine verdoyante sur laquelle s’écoulent paresseusement des dizaines de ruisseaux.
A l’ouest, une étonnante double ligne de falaises au creux desquelles s’écoulent une jolie cascade.
Au sud, scintillant sous le soleil du milieu d’après-midi, le lac Pingvallvatn s’étale à perte de vue.
Le lieu est enchanteur, presque magique, et ce n’est pas par hasard qu’ici, ont choisi de s’établir les Vikings dissidents de la couronne de Norvège, créant le premier parlement démocratique Européen, il y déjà plus de 1000, pour fonder ce qui deviendra l’Islande, leur centre du monde. Tant et si bien qu’aujourd’hui, convergent à Pingvellir des milliers de visiteurs, comme pour un pèlerinage initiatique où les Islandais viennent découvrir leurs racines, un peu comme si nous, les Français, allions faire cela en forêt de Brocéliande…
Et si le centre du monde Islandais est ici, le nombril n’en est pas loin.
Quelques kilomètres vers l’Est, Geysir. Le nom ne vous évoque rien ? Geysir, geyser, l’origine du mot des célèbres jaillissements, véritable image d’Epinal du pays. Aujourd’hui le phénomène est parfaitement expliqué, mais quel pouvait être l’effet produit sur les lointains ancêtres hirsutes à longues barbes ? De nos jours encore, ces irruptions de vapeur d’eau fascinent toujours autant les visiteurs du monde entier, installés en rond, comme pour un rite tribal, autour de ces points chauds, en guettant le moindre glouglou annonciateur d’une douche au parfum d’œufs pourris. Que ne ferait-on pas pour capter l’instant en selfie et l’envoyer illico aux amis restés à la maison ? Histoire de dire j’y étais. Heureusement, eux n’auront pas l’odeur.
Et l’on poursuit vers le sud et les somptueuses chutes de Gulfoss, Victoria ou Niagara Falls locales, écroulement dans un vacarme assourdissant de millions de mètres cubes d’une eau bleutée, à l’origine d’une brume diaphanes diffractés en arc en ciel au-dessus de la formidable cataracte.

Décidément ce pays réserve bien des émerveillements. 



jeudi 30 juillet 2015

Off-Road Movie



Quittant la zone glacière du Sud pour remonter sur les hauts plateaux à l’intérieur du pays, nous retrouvons avec plaisir les vertes prairies de l’été boréal où paissent quelques moutons esseulés entre les paisibles ruisseaux descendant des dernières neiges. Paysages bucoliques de cette nature apaisée, tellement reposante après le choc brut de ces derniers jours. Alors on profite en roulant doucement pour ne rien manquer des paysages. On musarde. On s’arrête faire des photos aux passages de gués. On discute en refaisant le film de notre vie et en imaginant l’avenir.
Puis la piste se met à monter. Les prairies abondantes disparaissent, laissant place à de maigres touffes clairsemées poussant difficilement sur le sol de scories noires où subsistent encore, à l’ombre, quelques plaques de neige fluorescentes. Tandis que quelques gouttes se mettent à tomber, la température chute à 5°.
Poursuivant notre « off-road movie », une étrange impression m’arrive par le volant du véhicule dont la direction se met à flotter bizarrement tandis que le voyant ABS s’allume. Un rapide coup d’œil pour m’assurer que nous ne sommes pas crevés. Nous repartons. Bizarre, les freins répondent de moins en moins bien et l’instabilité ne fait qu’empirer. Nouvel arrêt et diagnostic immédiat : la roue avant gauche fumante est piteusement en train de sortir de l’arbre de transmission. Heureusement que nous n'étions pas à 90 km/h sur une nationale ! Inutile d’insister, c’est la grosse panne.
Première question : y a t-il du réseau pour appeler le loueur et mobiliser l’assistance ?
Ouf, apparemment un faible signal arrive jusqu’au portable…
Rapides explications avec le gars, transmission par MMS d’une photo de la roue récalcitrante, du point où nous croyons être sur la carte, il me rappelle en annonçant l’envoi d’une dépanneuse et d’un véhicule de remplacement pour le milieu de la nuit. Nous l’attendons…