La voiture était prête depuis des
semaines, ou plutôt des mois, suite aux annulations successives de la plupart
des rallyes régionaux pour cause de Covid. Alors pouvoir la ressortir, enfin,
pour la course de côte historique de la Pommeraye était un très grand plaisir.
Celui de retrouver l’ambiance unique de motor racing : paddocks où les
voitures bichonnées, telles des chevaux de course piaffant dans leurs boxes, n’attendent
que de bondir, odeurs d’hydrocarbures et de caoutchouc brulés, pilotes dans
leur combinaisons multicolores, mécanos aux mains pleines de cambouis, passionnés...
Plaisir, mais aussi pointe d’appréhension
au moment de s’installer dans l’auto, sanglé, casqué, ganté, et la petite
musique qui vous rappelle qu’il ne va pas falloir faire n’importe quoi, que l’objectif
est de se faire plaisir sans bobo pour la voiture et ses occupants. Pareille à
celle qui me revient avant chaque décollage en avion ou étapes engagée en moto
tout terrain. Le jour où ça n’arrivera plus, il faudra s’arrêter.
Devant nous les voitures semblent
trépigner dans la file d’attente vers le starter. Rugissement des moteurs et ondes
de chaleur diffractant l’air au-dessus des capots surchauffés. On resserre les ceintures en se
(re)disant qu’on y va cool. Y’a pas d’enjeu. Tu parles...
Marco au chrono, moi au volant. Le drapeau s’abaisse, go !
Première, deuxième jusqu’à la zone
rouge, puis gros freinage pour l’épingle à droite.
L’auto glisse pour ressortir en léger
survirage. Troisième à fond dans le long gauche. A partir de maintenant rien n’a
plus d’importance que la trajectoire et la maîtrise de l’adhérence. Je ne vois
rien d’autre que ce trait imaginaire. Mon corps et la machine ne font plus qu’un.
Tout en écoutant le souffle du V6, je ressens aux fesses le moindre glissement
de l’auto. Chercher la limite sans la dépasser. Les virages s’enchainent :
droite léger suivi d’un gauche délicat avant le S de la passerelle. Puis gros
freinage à droite, relance, avant un autre sur la corde à gauche pour terminer à
fond jusqu’à la ligne d’arrivée.
Une minute douze seconde m’annonce
Marco. Quatre secondes de mieux que l’an dernier !
On avait dit cool...
Il est vrai que l’auto était bien mieux
réglée par Djo, notre ami sorcier-mécano.