jeudi 1 février 2018

Welcome to Atlanta !



Le vieux Boeing 767 est en approche finale sur l’aéroport d’Atlanta. A travers le hublot j’aperçois trois autres appareils en descente parallèle à la nôtre, tandis que d’autres avions s’éloignent sur des trajectoires ascendantes. Même habitué, je suis toujours impressionné par la densité des mouvements aériens sur cette plateforme où le trafic est le plus dense au monde. Balai bien réglé de machines volantes dans une incroyable fluidité.
On se pose en douceur et roulons très peu jusqu’à la passerelle de débarquement. Pas fâché de se dégourdir les jambes après plus de 10h30 vol.
Par principe je marche aussi vite que possible pour rejoindre rapidement les contrôles de l’immigration.
-       « Esta ou visa ? » me demande un agent posté devant les files d’attentes ?
-       Visa ?
-       Quel type de visa ?
-       Un visa Américain obtenu en France…
Il a l’air surpris et me demande mon passeport. Il l’ouvre, me dévisage et m’indique une ligne à emprunter vers des kiosques automatiques. Et là je me dis que ça va être rapide.
J’insère le passeport dans le lecteur automatique, la machine me reconnait, prend une photo, et m’imprime un bon barré d’une large croix. Là je me dis que ça ne sent pas très bon… Un autre agent m’indique alors une autre ligne.
Curieusement attendent ici principalement des gens du Moyen-Orient et aussi quelques Asiatiques… Pas d’autre choix que de faire aussi la queue.
Une heure est déjà passée et la douane se vide. Je suis quasiment le dernier à me présenter devant un agent plutôt sympa qui me demande ce que viens faire aux USA et pendant combien de temps. Ouvrant mon passeport il tombe sur le fameux bon barré d’une croix. Tout en scannant de nouveau le passeport il me dévisage, visiblement un peu gêné, avant d’appeler par téléphone un autre agent et de s’excuser par avance pour ce qui va m’arriver :
-       C’est un peu ridicule, me dit-il, mais je vais vous demander de suivre mon collègue vers le « back office ».
Le gars en uniforme m’escorte jusque dans un local de verre sécurisé adossé à une large vitre sans teint. Sont entassées là quelques personnes du Moyen-Orient et 2 Chinoises visiblement désemparées. On me demande d’attendre. Alors j’attends pendant une nouvelle heure avec interdiction formelle d’utiliser téléphone portable et ordinateur. Inutile de s’énerver, même si la tension est palpable. Je sais parfaitement que tout cela n’est que le soubresaut d’une aventure qui m’était arrivée l’an dernier à la même époque. Alors en transit à Shanghai vers les USA, j’avais tout bonnement été refoulé au moment de monter dans l’avion puis immédiatement renvoyé vers la France. Situation des plus désagréables, conséquence d’un voyage en Iran quelques mois plus tôt et qui, par le truchement des recoupements informatiques, m’avait black-listé pour entrer aux Etats-Unis. J’avais alors dû passer par une procédure spéciale de demande de visa pour être en mesure d’entrer de nouveau sur le territoire Américain. Depuis j’y suis retourné sans problème, mais cette fois cela semble bugger. Et je me dis que s’ils me refoulent je fais un scandale. En attendant je n’ai qu’à attendre parmi ces gens en méditant sur les effets de la discrimination ordinaire.

Une heure et quart passe avant qu’un gros agent, à priori féminin, n’ouvre la porte et m’invite à la rejoindre pour une séance de « questionnettes » devant 2 autres costauds mâles.
-       Rien d’important Monsieur, mais pourquoi avez-vous 2 passeports ?
-       Et pourquoi voyagez-vous en Iran ?
-       Et vous êtes aussi allé au Pakistan n’est-ce pas ?
-       Ainsi que dans de nombreux pays Arabes…
-       Etc… etc.
J’ai bien envie de leur expliquer que les Iraniens ne sont pas des Arabes, mais je crois que ça leur serait passé au-dessus de la casquette. Alors je me borne à faire profil bas en répondant calmement et sans plus de détail aux questions posées.
-       Vous êtes aussi Président de sociétés aux USA ?
-       Ben oui.
-       Et cela marche bien pour vous ?
-       Ca dépend…
-       Et vous aimez l’Amérique ?
-       Ca dépend…
Petit instant d’hésitation, puis,
-       OK Monsieur, toutes nos excuses pour ces désagréments. Vous pouvez maintenant y aller.
-       Vous me redonnez mon passeport SVP ?
-       Oui bien sûr. Excusez-nous encore.

Je passe récupérer ma valise dans le local de « rétention » et ne peux m'empêcher lâcher un « Good Luck to all » aux autres « invités », ce qui ne fait visiblement pas sourire l’agent.

Pas sûr que cela finissent aussi bien pour chacun d’eux.