samedi 3 juin 2017

Buddha is not for decoration



Bangkok ne s’arrête jamais. Même la nuit les charters et autres vols réguliers déchargent leur flot de touristes du monde entier venus chercher ici un certain exotisme, clichés standards du climat tropical associé à la réelle gentillesse des gens, ce sens du service qui fait que l’on se sent immédiatement à l’aise ici.
Congestionnée la journée par la circulation dans une ambiance de cocotte-minute, le soir la ville devient agréable. Il y fait moins chaud, l’air devient plus respirable, et l’on circule plus facilement. C’est l’occasion de musarder dans les quartiers et s’arrêter manger la « street food » au coin de la rue, brochettes de crevettes, de poissons ou de poulet agrémentées de sauces piquantes et de riz blanc pour adoucir.
Au hasard je m’assois sur un petit tabouret parmi ces gens souriants. De l’autre côté de la rue, sur une terrasse ventilée par des grands brasseurs d’air style coloniaux, un bar à bière plein de touristes à chemise à fleur installés sur du mobilier en rotin, et quelques hommes accompagnés de jeunes filles locales. La misère sexuelle a aussi trouvé là un eldorado.

J’attrape un tuk-tuk vers Pad Pong, histoire de redécouvrir l’atmosphère unique qui règne à cet endroit, mélange frénétique de dépravations où les pipe-shows s’exhibent au grand jour derrière des rideaux entrouverts comme des jupes fendues faites pour attiser tous les désirs. Les filles ne sont ici que de la chair humaine pour voyeurs lubriques venu satisfaire je ne sais quels fantasmes. Et ces couples d’occidentaux bedonnants venus aussi se rincer l’œil ensemble devant des gamines qui pourraient être leur fille. Si le tourisme sexuel est interdit avec les enfants, la ligne blanche reste bien pointillée.
Puis tous ces commerçants vendant les mêmes fausses montres de marque, faux Lacoste et autres copies de vêtements et chaussures de sport. L’illusion de pouvoir accéder au luxe pour presque rien, et cette question du comment font-ils ? Non pas pour vendre à ces prix, car ça ne vaut pas plus, mais pour organiser une telle industrie de la contrefaçon.

L’heure avance et il est temps de rentrer. Faute de tuk-tuk j’attrape une moto taxi, ce que je ne ferai jamais plus ! Se faire piloter par un jockey de 50 kg, sans casque, sur une pocket-bike… Je ne sais pas ce qui m’a pris. Sans doute le décalage horaire.
Sur le bord de la rocade, une grande affiche : « Buddha is not for decoration, respect is common sens ».
Ce n’est pas la première fois que je la vois. Mais elle ne m’avait jamais frappé à ce point. Et je ne peux m’empêcher de faire le parallèle entre l’étalage de contrefaçons vu quelques instants plus tôt, avec ce que nous trouvons dans les boutiques de décoration à la mode chez nous : têtes de Buddha bon marché pour agrémenter son salon d’une touche de zénitude. 
Mais à bien y réfléchir, quel en est le sens profond pour nous ?
Ne serions-nous pas là-aussi un peu contrefacteurs de spiritualité ?



jeudi 1 juin 2017

Hong Kong star



Aéroport de Nankin : très en avance pour mon vol de nuit vers Bangkok, je déambule nonchalamment, gérant tant bien que mal mon décalage horaire au terme d’une longue journée de travail avec des partenaires Chinois.
Comme la plupart des aéroports celui-ci est flambant neuf, tout comme les gares, les lignes TGV, les autoroutes, infrastructures de transport issues du plan de développement mis en œuvre au pas de charge par le gouvernement ces dernières années. Mais pour quels résultats ! Cela devient franchement facile de voyager en Chine, si ce n’est encore parfois la barrière de la langue. Mais là encore les Chinois progressent à marche forcée, aidés par des programmes pédagogiques sur les chaines publiques.

Tirant ma « fidèle » valise à roulette, privilège des grands voyageurs je m’engage sur le tapis rouge de la ligne  « Sky Priority » de l’enregistrement international de la China Eastern Airline. Tout sourire la charmante hôtesse m’attribue le siège en issue de secours demandé pour y glisser mes jambes. Curieusement, j’entends glousser un groupe de jeune filles visiblement assez excitées au comptoir voisin. Je me retourne machinalement et me retrouve face à une nuée de smartphones pointés dans ma direction. Passé le moment de surprise, une jolie personne s’approche en me demandant un autographe dans un anglais volontaire. Etonné je demande pourquoi.
-       Mais vous êtes bien le chanteur (suivi d’un nom que je n’ai ni compris ni retenu).
-       Ben, non.
-       Vous êtes sûr ?
-       Oui, plutôt sûr. Et même tout à fait.
Je lis la déception sur le visage de la groupie et m’éloigne en souriant.

Encore plus de deux heures avant mon vol. Au hasard je m’arrête manger une soupe de nouilles dans un fast-food de l’aéroport. Plutôt bonne la soupe : un peu épicée et agrémentée d’herbes aromatiques. Tandis que j’aspire une bouchée de ces spaghettis mouillés en essayant de ne pas faire trop de bruit, du coin de l’œil j’aperçois ceux, curieux, de trois jeunes gens installés sur la table voisine. Puis un jeune homme affable s’approche :
-       Vous être bien le chanteur de Hong-Kong (suivi d’un nom que je n’ai ni compris ni retenu).
Pour la blague, tout de go je réponds : pourquoi pas.
-       Puis-je faire une photo ?
-       Si vous voulez…
Et nous voilà parti dans une séance de selfies avec le petit groupe.
Trop dur d’être une star. Encore heureux qu’ils ne m’aient demandé de pousser la chansonnette.

(Par curiosité le suis allé chercher sur Google les chanteurs en vogue à Hong-Kong, mais n’ai trouvé que des bellâtres imberbes. Tout à fait moi…)