La jolie route de montagne nous conduit
vers des prairies d’altitudes où paissent paisiblement de modestes troupeaux. Sous
la lumière de midi, quelques maisons en bois regroupées par 2 ou 3 donnent au
paysage des allures de western. Puis la route continue de serpenter à travers
de denses forêts de conifères aux senteurs de résines où sont disposées par
groupes d’une quinzaine des ruches jaunes et bleues. Rien ne semble devoir troubler
ces paysages bucoliques où quelques hommes aux visages burinés vaquent à leurs
occupations pastorales.
Puis l’on redescend tranquillement le
versant Nord du relief pour rejoindre une vaste vallée. De part en part sur le
bord de la chaussée de nombreuses petites stèles à l’effigie de soldats morts
au combat.
Au carrefour rejoignant la route
principale, plusieurs maisons abandonnées criblées d’impact de balles.
Peut-être un croisement considéré comme stratégique.
La vallée se fait maintenant plus
étroite. Remontant la rive gauche de la rivière, toujours plus de maisons
détruites ou abandonnées, portes et fenêtres simplement obstruées par des planches
grossières de ceux qui ont fuit et ne sont jamais revenus. L’ambiance devient
pesante, presque oppressante tant on perçoit la violence de ce qui s’est passé
ici. Puis une première pancarte indiquant la direction de Srebrenica dans une
dizaine de kilomètres. Nous roulons maintenant quasiment au ralenti, impressionnés,
presque intimidés comme si l’on entrait dans un lieu sacré. Quelques kilomètres
plus loin, sur notre droite, en face d’un bâtiment des Nations-Unies, un
impressionnant alignement de petits poteaux blancs matérialisant les tombes des
plus de 8000 victimes du génocide qui s’est déroulé « ici ». Deux cars
scolaires déposent des enfants venus visiter le mémorial. Pour je ne sais
quelle raison, nous n’osons nous arrêter ici et continuons notre route vers la
ville quelques kilomètres plus loin.
Nous y entrons doucement, presque
intimidés.

En contre bas une gargote tenue par
deux petits vieux. Nous y entrons par l’odeur alléchée. Sur le fourneau des
plats mijotent doucement, exhalant des délicieuses effluves de cuisines. Nous y
déjeunons pour rien en dissertant sur les risques de montée des nationalismes,
découvrant sur nos smartphones l’édito du journal le Monde contre Marine Le Pen.
Nous quittons la vallée par un petit
col étroit redescendant vers la Serbie. Poste frontière minable où quelques
agents désœuvrés contrôlent nonchalamment les passeports. Franchissant un pont
métallique antédiluvien au dessus de la rivière Drina, nous entrons dans le pays. Dès les premiers kilomètres des signes ostentatoires à la gloire de la
grande Serbie. Toujours ce malaise ambiant.
Rejoignant Kraljevo en fin d’après-midi
nous finissons chez Vladimir, un ami de Didier qui nous accueille les bras
ouverts.
-
Vous
arrivez d’où ? (dans un Anglais très correct)
-
De
Srebrenica ?
-
Mais
vous n’êtes pas passés par la route touristique et le Parc National de Stara
Planina ? La route est très plaisante à moto.
Un vrai malaise s’installe.
Puis d’ajouter :
-
Vous
savez, il ne s’est pas du tout passé ce qu’on prétend à Sebrenica. Ce n’était
que des faits militaires. J’y étais.
Puis, sans que nous commentions d’avantage,
Vladimir de remonter à des faits de guerre datant de 1942, quand l’armée
Allemande avait massacré toute une partie de population de la ville, posant la
Serbie en martyre depuis 3 générations. Le complexe des peuples victimes du
populisme de leurs dirigeants…
Inutile de polémiquer, nous sommes
invités à passer une bonne soirée dans un restaurant typique. Il y a tellement
d’autres beaux sujets de conversations à partager entre amis de cultures différentes.
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