samedi 25 octobre 2025

De Nouhadibou aux portes de l'Adrar

Notre arrivée à Nouadhibou est une immersion immédiate, sans transition, dans ce que l’on appelle ici l’Afrique noire. La ville nous enveloppe d’un chaos vivant. de nuits, nous descendons l’avenue principale dans un slalom permanent : voitures sans phares déboulant de nulle part, piétons marchant sur la chaussée comme s’il n’y avait ni trottoir ni règle, ânes tirant des charrettes bringuebalantes, motos surgissant à contresens. Ballet déroutant, mais étrangement fluide, où, malgré la pénombre, chacun semble trouver sa trajectoire au dernier moment.
Le GPS nous guide vers la ville basse, dans les quartiers en terre battue, jusqu’à l’Auberge Sahara de Fanta. Retrouvaille chaleureuse avec cette femme qui nous avait accueillis, Didier et moi, lors de notre voyage à moto l’an dernier. Elle ouvre sa maison, très simple aux voyageurs de passage avec un large sourire et cette générosité si naturelle. Le dîner, préparé avec soin, est tout aussi simple et délicieux. Autour de la table, nos vies se racontent. La sienne, ancrées dans ce sable mauritanien malgré le décès récent de son mari, et les nôtres, façonnées par d’autres horizons. Un échange sans jugement, teinté d’écoute, de curiosité et de sourires.

Au matin, nous quittons Nouadhibou par la route qui longe la mythique ligne du train minéralier venant de Zouerate. Nous espérions croiser ce convoi légendaire : plus de deux kilomètres de wagons chargés de minerai de fer glissant à travers le désert. Manque de chance, nous n’étions pas au bon horaire.

Cap plein sud. La route coupe la plaine jusqu’à Chaami, ville née de la ruée vers l’or saharien. Tout ici semble construit à la hâte, comme posé sur le sable. Amoncellement de baraques faites de bric et de broc, autour d’une rue commerçante au pied d’une petite mosquée. Le souffle brûlant venu de l’Adrar nous écrase. 44 °C au thermomètre. Nous nous arrêtons dans une gargote. Au menu, un plat de riz partagé avec des hommes enturbannés dans leurs chèches, silhouettes de western touareg. Ils entrent et sortent de la pièce comme dans un saloon poussiéreux. Pas d’alcool, bien sûr, mais du thé à la menthe, dense, sucré, servi trois fois selon la tradition. Certains s’étendent, repus et silencieux, sur des nattes pour la sieste, en attendant que le soleil baisse un peu.

Nous reprenons la route vers l’est, en direction de l’Adrar. Les kilomètres défilent dans un décor d’aridité totale. Quelques acacias tordus et clairsemés donnent au paysage des allures de savane. De loin en loin, de magnifiques champs de dunes ondulent comme un océan doré. 48 °C à l’extérieur, 28 à l’intérieur avec la clim à plein régime. Et pourtant, nous sommes déjà mi-octobre. Puis, surprise du désert, quelques pousses vertes tapissent par endroits le sol d’une couleur délicate, presque irréelle, preuve fragile et éphémère d’une pluie récente.

La route semble sans fin jusqu’à Akjoujt, étape du soir. Derrière nous, le soleil décline, noyé dans une atmosphère étouffante. La lumière devient blanche, crayeuse, comme si les couleurs s’étaient diluées dans un monde devenu soudain monochrome. Nous arrivons à la nuit tombante, saturés de chaleur. Le thermomètre indique toujours 44°. L’image de Tintin et l’étoile mystérieuse me vient alors à l’esprit.



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