dimanche 12 février 2012

Porter haut, dormir bas

 7h30, nous partons pour la montée vers le camp n°2, Nido de Condores 5500m, que nous devons équiper en vue de l’assaut final prévu milieu de semaine et qui devrait normalement se dérouler en 3 étapes :
-    Lundi, remontée vers Nido, où nous passerons la nuit,
-    Mardi, ascension jusqu’à Colera, 6000 m, où nous bivouaquerons dans des conditions assez difficiles,
-    Mercredi, départ de Colera vers 5h30 pour tenter l’assaut final. Si tout se passe bien nous devrions atteindre le sommet en début d’après-midi…
Tel est donc le programme vu d’aujourd’hui, encore susceptible de bouger fonction des conditions météos. De la neige est annoncée pour la nuit prochaine sur le sommet, et du vent assez fort pour Mercredi avec des températures très basses, - 30° ! Mais tout cela peut encore évoluer. « Le temps change si vite en montagne… »

Dès la sortie du camp de base nous abordons une pente assez forte sur sol gelé. L’aube se lève juste, et la lune presque pleine donne au paysage encore gris une agréable touche poétique.
Nous marchons en file indienne. En tête, Ivan, notre guide donne le rythme, tandis que Bruno, le guide assistant qui nous a rejoint pour la phase finale de l’expédition ferme la marche.
Soudain, comme un flash la montagne s’illumine derrière nous à l’instant où les premiers rayons du soleil passent la ligne de crêtes sur laquelle nous progressons dans l’ombre du relief.
L’effort devient plus intense. Nous approchons des 5000 m lorsqu’enfin nous profitons de la caresse bienvenue de l’astre du jour.
Avec l’altitude la respiration devient plus difficile, exactement synchronisée sur nos tous petits pas réguliers. Chacun est maintenant dans sa bulle, concentré sur l’effort intense de l’ascension : faire un pas, expirer, puis le suivant en inspirant et recommencer sans se distraire. Ne penser qu’à ça. Toute « erreur » de respiration est immédiatement sanctionnée par une oppressante sensation d’asphyxie.
5200 m, le camp 2 signalé par un petit drapeau semble maintenant à portée de main. Mais notre progression est si lente et l’air si rare…
Je jette un œil sur mon altimètre : 510 mbar, moins de la moitié de la pression atmosphériques au niveau de la mer. Ici chaque molécule d’oxygène compte double. Et ce drapeau qui semble ne jamais vouloir se rapprocher. Rester concentré, faire un pas, respirer, puis faire un autre pas et respirer encore. Je me retourne. Mes camarades ont aussi les visages marqués par l’effort.
5400 m, nous y sommes presque… Au moment où nous touchons au but le temps change brusquement. A notre droite, quelques 1500 m plus haut, l’imposant sommet de l’Aconcagua s’ennuage brusquement en même temps que la température chute. Nous enfilons nos vestes en « Gore-Tex ».
5480, nous y sommes enfin. Notre équipe de portage est déjà là, tentes montée, et bidons vivres mis à disposition. Ivan vérifie rapidement que tout est OK, nous avalons sans traîner un sandwich et déjà il faut redescendre au camp de base avant que la météo ne se dégrade trop.

Demain jour de repos avant l’ultime effort pour l’ascension finale. Notre équipe est au mieux, plus déterminée que jamais !



Nous ne serons très probablement pas en mesure de communiquer les 4, 5 prochains jours. Dans les conditions extrêmes je vais tenter de poursuivre cette narration au jour le jour et la mettrai en ligne fin de semaine prochaine, en espérant que le matériel ne nous lâche pas en route. Quoiqu’il en soit, très vite la suite. Et merci pour votre fidélité.

...

Au moment de la mise en ligne de cette chronique la neige se met à tomber sur le camp de base et la température baisse rapidement…



7 commentaires:

Anonyme a dit…

Nous sommes connectées quotidiennement à votre progression. Nous penserons à bien à vous ces 3 prochains jours. Et que la météo vous laisse juste le petit créneau nécessaire. Bises à Yves. Michèle et Sabine

Jotreau Françoise a dit…

merci Fred de cet échange. ça me rassure. à chaque fois,ce n'est que du bonheur. bon repos avant le grand rush......... je crois en vous tous.
Amicalement. Françoise

Marinette Le Roux a dit…

Coucou Claude quel plaisir de vous suivre ...merci Fred. Que de merveilleux paysages. Pas à pas moralement nous serons avec vous pour l'assaut final ...
Bonne ascesion vous êtes formidables.
Bises à toute la "gagne" Marinette

Le Roux Marinette a dit…

11h17 le sommet est proche j'espère...
Vivement de vos bonnes nouvelles !!!
Ici pluie et grisaille on regrette presque le soleil et les
-20°
Bises à tous Marinette

Marinette Le Roux a dit…

A chacun ses sommets ...
solidarité, raison voilà aussi de beaux sommets ...
Bravo à toute l'équipe pour cette belle ascension, j'attends avec impatience vos commentaires sur le blog... Claude quel exploit 6000m c'est quand même autre chose que 360 km en vélo !!!
bises à tous Marinette

Anonyme a dit…

belle aventure
moi aussi j'ai hâte de lire la suite
merci fred pour ces partages
bravo à vous tous
et au plaisir d'entendre les commentaires
isabelle

Fred Grimaud a dit…

Merci à tous pour vos encouragements. La suite demain.