vendredi 13 août 2010

Des hautes vallées Himalayennes vers le Nirvana...

De Lhassa nous partons vers le Nord-Est remontant la vallée de la rivière Kyichu vers les hauteurs à la découverte du Tibet rural.
Sortant de la ville, la vallée encore large se couvre de verts pâturages parfois marécageux entre des villages dont les maisons de pierres joliment montées de gros blocs rectangulaires sont construites suivant le même modèle : une pièce principale devant laquelle s’étale une modeste terrasse couverte, puis deux petites ailes latérales, le tout entouré d’une enceinte de pierres rondes de rivière au dessus de laquelle est stocké le combustible pour l’hivers, des milliers de bouses de yacks bien agencées en position verticale légèrement inclinée, comme les livres d’une bibliothèque.
Très souvent, devant la maison, une bouilloire solaire, parabole réfléchissante concentrant les puissants rayons du soleil à cette altitude sur un récipient posée sur un support au centre du foyer. Autant de bouses de yack économisées pour l’hiver…
Au fur et à mesure de notre progression les villages sont plus clairsemés et la vallée se fait plus étroite laissant place à de petites parcelles de cultures de céréales en terrasses de forme plus ou moins ovales.
Nous franchissons la barre des 4000 m d’altitude et croisons maintenant aussi des tentes nomades noires faite de laine de yack, desquelles s’échappent parfois un filet de fumée bleutée, habitat traditionnel des éleveurs accompagnant leurs troupeaux au gré des saisons.
Nous montons toujours jusqu’au cul de sac conduisant au monastère de Dringuill-Till par une petite piste à flan de montagne. Mieux vaut ne pas regarder en bas. Mon altimètre indique alors 4360 mètres et Flo est prise de violents maux de tête. J’ai mal avec elle mais ne peux rien faire de significatif pour la soulager après qu’elle ait pris antalgiques et respiré l’oxygène que l’on trouve ici en aérosol.
Comme les enfants semblent plutôt très bien supporter le choc, nous partons faire la visite au pas de charge, laissant Flo à son triste sort dans le minibus. Je culpabilise en me disant qu’il ne s’agit que d’un monastère de plus et que nous ferions mieux de redescendre au plus vite.
Visite somme toute assez banal maintenant que nous en avons vu un certain nombre, sauf que celui-ci a la particularité d’être un des lieux de sépulture traditionnelle Tibétain. Et là je dois reconnaître que rite mortuaire ordinaire que l’on nous a expliqué ne nous a pas laissé indifférent. En effet, sauf exceptions, le défunt n’est pas ici mis en terre ou incinéré comme nous l’aurions naturellement imaginé si la question nous avait été posée, mais emmené sur un lieu sacré dans la montagne, puis découpé en petits morceaux laissés aux oiseaux. Il nous a bien fallu plusieurs minutes pour assimiler l’information. Une image me revient alors à l’esprit. En arrivant sur la place du monastère dominant une perspective spectaculaire sur la vallée, je m’approche de l’épais mur faisant office de garde fou et aperçoit un gros oiseau jouant avec ce qui m’avait semblé être un doigt. Rationalisant la situation je me suis dit qu’il s’agissait surement d’une hallucination due à l’altitude. Ce n’était peut-être finalement pas le cas…

Sous quelques goûtes d’eau nous retrouvons Flo nous attendant dans la voiture et « descendons » vers une chambre d’hôte pour y passer la nuit.
Le lieu est intéressant, au creux d’une étroite vallée à 4150 m d’altitude, construit sur des sources d’eau chaude.
En entrant dans « l’établissement » Alex croise un gars au sourire éclairé lui déclarant spontanément :
- Welcome here whoever you are! (Bienvenu ici qui que tu sois !)
Un peu en contrebas, au bord d’un bassin fumant d’eau chaude, une jeune femme rouquine plutôt jolie s’adonne à une démonstration de postures Yoga plus étranges les unes que les autres, tandis qu’une grosse femme fait trempette dans le bassin avant d’en ressortir rouge écrevisse.
Plus loin un homme d’âge déjà mur ressemblant étrangement au faquir des albums de Tintin fait quelques étirements sous le regard gourmand d’une femme habillée d’ample tissus légers acheté sans doute acheté localement et faisant sur elle quelque peu déguisement…
Vous l’avez deviné, se trouve ici tout un groupe de Californiens un peu baba probablement à la recherche du Nirvana.

Toujours aussi enthousiaste Nina veut aussi tenter l’expérience. Non, pas celle du Nirvana, pas déjà, mais de faire trempette dans le bassin alimenté par les sources chaude. N’ayant aucune notion sérieuse de géologie, je m’étonne d’ailleurs que l’eau chaude puisse remonter si haut dans la montagne, mais c’est un fait. Malgré plusieurs tentatives Nina ne parvient pas à se baigner. Trop chaud !

Nous allons dîner avec les enfants dans une salle réchauffée, plus exactement enfumée par une petite cheminée alimentés aux bouses de Yack séchée. Je vous laisse imaginer le parfum. Toujours au plus mal Flo est restée allongée dans la chambre. Le prochain « hôtel » sous les 4000 se trouvant à plus de 90 kilomètres sur une route défoncée, nous avons convenu que ce n’était pas une option raisonnable pour ce soir.
Repas frugale : poulet curry, riz, nouilles sautées et raviolis locales au fromage. Sans plus.

Petite nuit… Au réveil de 8 heures Flo semble émerger un peu des brumes qui n’avaient rien du Nirvana. Je sorts respirer « le bon air (rare) de la montagne » et, notre chambre donnant sur la source d’eau chaude, n’en croit pas mes yeux : une baleine (rappelez-vous la grosse dame « gourmande » qui regardait le fakir dont le je vous ai parlé tout à l’heure) se baigne toute nue dans le bassin, portant seulement ses lunettes fumées à bord dorée, façon Tom Cruise dans Top Gun. Evidemment ça réveille !

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