mardi 15 mai 2018

Reconnexion



On sort du désert comme on y entre, doucement, mais empreint d’une certaine nostalgie en même temps que de sérénité :
-       Nostalgie, avec comme un manque d’espace en revenant dans un environnement organisé par les hommes et contraint par des règlements. Alors que « là-bas » la nature a gardé tous ses droits, auxquels, en toute liberté, nous devons nous adapter avec modestie et détermination.
-        Sérénité d’y être allé se dépasser au contact d’un environnement spectaculaire et exigeant.

Sur le tableau de bord de la moto, le cap est maintenant au Nord. Curieux tout de même de se dire que dans notre imaginaire le désert se trouve « toujours » au Sud. Comme s’il rimait nécessairement avec soleil incandescent, dunes dorées, oued et oasis, formatés que nous sommes par l’imagerie des livres de géographie de notre école primaire.
Alors qu’il en existe tant, il ne fait aucun doute que le Sahara occupe une place à part dans les déserts du monde. Et avoir le privilège de le parcourir est à chaque fois une expérience unique. Cette édition en fut une nouvelle illustration.

Nous remontons vers les terres habitées en franchissant le djebel Sahro, zone aride rocailleuse où quelques bergers conduisent de modestes troupeaux vers d’éphémères pâturages, en réalité de rares touffes d’herbes cachées entre les cailloux. Alors tandis que leurs troupeaux paissent, pour tuer le temps, ils érigent de singuliers alignements de kerns d’une remarquable puissance esthétique.

Puis nous entrons en pays Berbère où la magnifique aura des femmes ramène les hommes à la réalité de leur condition de mâles non dominants. J'aimerais photographier ces beaux visages puissamment maquillés et leur tenues chamarrées mais n'ose pas le faire brutalement. Nous ne sommes que de passage.
Talouine et ses champs de Safran, l’or rouge que les petites mains prélèvent avec délicatesse. On s'y arrête manger des brochettes et boire du thé à la menthe sur la place du village, enfumés par les effluves piquantes des barbecues, tout simplement à regarder les gens, échanger des sourires avec les enfants et quelques mots en français avec les plus âgés.
Puis le franchissement du massif de l’Atlas par le spectaculaire col du Tizi-n-Test et ses vertigineuses perspectives, peut-être l’une des plus belles routes du monde, avant de redescendre vers Marrakech la cosmopolite.
Marrakech et sa trépidante place Djema Hefma, cour de miracles où se côtoient touristes du monde entier, charmeurs de serpents, diseuses de bonne aventure, infirmes exhibitionnistes, musiciens, vendeurs de fruits secs et de jus d’orange, restaurants ambulants, dans une ambiance unique comme sortie d’un autre temps. Terminant tout juste notre méharée, et encore sous le charmes des images glanées au long de cette journée de reconnexions avec le monde des Hommes, on s’y sent bousculé, presque violenté, jusque dans l’hôtel minable où nous sommes descendus et qui se fout bien de la gueule du client.
Alors nous n’avons plus qu’une hâte, repartir, retourner au contact des « vrais gens », dans leurs « vraies vies ».



Aucun commentaire: