L’appel du Grand Sud est irrésistible. De
plus en plus étroite la bande d’asphalte nous aspire vers un horizon sans
limite. La végétation disparait au profit de paysages épurés d’une grande
puissance esthétique, purement minérale, où l’espace se confond avec le temps
tant les perspectives sont inhabituelles, sauf peut-être pour les marins.
Dans la lumière vibrante l’air devient
plus sec. Nous roulons dans une autre dimension, le regard tendu vers les
promesses d’un eldorado désertique, le Sahara, nom magique synonyme pour moi d’absolu.
D’aucuns diront d’absolument rien. Je dirais exactement l’inverse, tant l’épure
de ce chef d’œuvre naturel me semble parfaite : du superflu il ne reste
rien que la terre, le ciel et les Hommes qui s’y accrochent.
Puis comme un miracle apparaît la
vallée du Ziz, coulée verte serpentant sous le plateau aride, au creux de
laquelle s’épanouissent de luxuriantes oasis dont certaines sont devenues des
villes prospères, Ar-Rachidia, Erfoud, où les touristes du monde entier affluent
maintenant en masse.
Rissani, la fin de la route, pile au
moment où le soleil tombe derrière l’horizon. Au chant du muezzine, nous
trouvons une gargote à 10€ la nuitée sur la place du village. Exactement le type d’endroit que j’affectionne
particulièrement, là où vivent les gens du coin et donc où les chosent se
passent. S’installer alors sur la rue pour manger un tajine n’a d’égal qu’un
très bon film de cinéma, sauf qu’ici on est au cœur de la vraie vie d’une ville
de désert au charme si particulier. Ici la poussière est propre ; sable porté
par vent que rien ne peut arrêter. Et ce creuset de populations, nomades
enturbannés, ruraux encapuchonnés façon Merlin l’enchanteur et villageois voulant
se donner un style petits bourgeois à la mode de Paris, délicieux mélange des
genres dans une société en pleine mutation vers la soi-disant modernité.
Comme de bien entendu en pays de
tradition musulmane, seulement les hommes sont de sortie à cette heure « tardive ».
Alors comme un fait exprès, en arrière fond sonore des youyous de femmes
accompagnent de la musique traditionnelle. Peut-être une fête de mariage.
Le patron commence à rentrer les
chaises et la place se vide doucement. Il est temps de monter se coucher sous un
ciel piqueté d’étoiles.
Le film de la soirée était parfait.
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