samedi 19 mars 2011

Terre nourricière

Quittant l’Asie encore sous le choc du terrible séisme au Japon, courte escale à la maison, tendresse de Flo, joie de vivre de Nina et plaisir de retrouver les amis pour une crêpes partie improvisée, avant de poursuivre ma remontée contre le temps, traversée de l’atlantique sur une belle trajectoire oblique vers le Brésil.

Sao Paulo, mégapole tentaculaire asphyxiée sous l’énorme bulle de carbone des millions de véhicules circulant difficilement sur des avenues congestionnées.
Sans transition 4 heures de voiture vers le Nord-Est. Nous finissons par sortir du chaudron. Conditions de circulation épouvantables sous des trombes d’eau telles des murs de pluie, comme si l’on passait sous des cataractes célestes.
Puis, en cette fin d’après-midi, instant magique où le ciel s’éclaire de flamboyantes rayons de lumières éblouissants sur fond de ciel indigo entre d’énormes cumulus tropicaux. Je rejoints l’hôtel et m’effondre sur le lit.

A bord de son pick-up 4x4 Francisco roule à vive allure. 30 kms de piste après avoir quitté la route secondaire asphaltée mais trouée d’énormes nids de poules. Sur la banquette arrière nous rebondissons comme sur un trampoline. Lui s’amuse visiblement plutôt bien, piquant des pointes à 100 km/h sur les courtes portions de lignes droites avant de brutales coups de frein…
Nous arrivons enfin sur un impressionnant plateau cultivé à perte de vue, alternance d’immenses parcelles de soja n’attendant plus que d’être récoltées sitôt que les machines pourront rouler sur le sol encore détrempé, et de « trognons » de maïs en train de pourrir avant la prochaine plantation.
- Voilà, c’est ici chez moi ! nous dit fièrement Francisco, petit homme jovial approchant la soixantaine aux yeux rieurs et la peau tannée de ceux qui vivent dehors.
Et il a toutes les raisons d’être fier notre homme.
En toute simplicité il nous raconte son histoire, ralentissant du même coup le rythme de conduite pour adopter le style promenade coude à la portière, toutes vitres ouvertes pour profiter du bon air des grands espaces, de SES grands espaces. Rendez-vous compte, une exploitation agricole de quelques 8000 hectares. Rien que ça !
En arrivant avec son frères jumeaux dans le Minas Gerais il ya plus de 30 ans, ils n’avaient rien d’autre qu’une formidable envie de travailler. Attirer par cette terre, allez savoir pourquoi ils commencèrent à la gratter ici, au milieu de nulle part au plutôt au bord du rio charriant une terre rouge entre des arbres magnifiques. Et la chance leur a souri : parmi les cailloux au bord de l’eau ils trouvèrent des diamants !
Et que fait-on avec des diamants ?
Et bien on les vend pour acheter cette fois-ci de la vraie terre, celle du haut plateau sur laquelle poussent dans un désordre apparent de maigres bosquets. Et on y met de l’ordre : on défriche, on l’enrichi en calcaire, on y sème ses premières graines de maïs et le miracle se produit : quelques mois plus tard l’association de l’eau du ciel et de l’énergie solaire produit des plantes magnifiques chargées d’épis aux grains dorées, illustration parfaite du potentiel de la terre nourricière lorsque l’homme s’en occupe.
Et que fait-on avec des grains de maïs ?
On les vend bien sûr pour en tirer profit, fruit mérité du travail de la terre. Et quoi d’autre ? Et bien on peut aussi les utiliser pour nourrir des cochons par exemple, histoire de poursuivre le cycle de la vie et permettre aux hommes d’accéder à une source régulière de protéine animale de qualité, ce qui, ne vous a pas échappé, est la raison rationnelle de ma visite.

Nous arrivons sur la Fazenda, sobre et belle construction basse recouverte d’épaisses tuiles rouges entourée de pelouses impeccables au bord d’un point d’eau naturel où s'ébattent quelques canards de barbarie.
Il y a la le frère de Francisco, copie conforme au point de ne pouvoir les différencier, ses fils – deux solides gaillards à l’air sympa – son épouse au visage agréable. Ils ne vivent pas là mais y passent leur fin de semaine, au milieu de cette terre dont ils ont si bien su tirer parti.
En échangeant quelques mots avec la dame, je lui demande gentiment si elle porte quelque fois des diamants ?
- Les diamants c’est pour le gens riches me répond t-elle avec un sourire entendu.

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