lundi 26 septembre 2022

Jebel

 
Les nuits dans le Désert sont à nulles autres pareilles. Celle-ci ne fit pas exception. Sous un ciel d’encre piqueté d’étoiles, et dans un silence absolu, juste se laisser aller à un vertige stellaire, aspiré par l’immensité de l’univers, avec comme seul bruit de fond, ses propres battements de cœur et sa respiration. De là à partir en lévitation... Selon Facebook, Certaines personnes perchées l’auraient expérimenté. Pour ce qui nous concerne, profitant pleinement de l’apesanteur en position allongée, avons juste passé une nuit exceptionnelle au terme d’une journée qui ne l’était pas moins.
 
Parfaitement reposés, nous roulons 62 kms pour finir en panne sèche pile au premier point de ravitaillement. Jour de chance. Cette fois-ci de l’essence Libyenne en bouteille d’eau, de première qualité selon le vendeur, clope au bec dans les vapeurs d’hydrocarbures de son échoppe.
 
Des pistes sablonneuses d’hier nous visons aujourd’hui celle longeant vers l’Est et par le Sud le Jebel Tegaga depuis Kebili. Grand moment de moto façon spéciale de Rallye. Ca roule (très) vite tout en jouant sur les appuis de la machine. Un pied total dans un environnement grandiose aux perspectives d’une rare profondeur. Sous un ciel indigo, sur notre gauche à une dizaine de kilomètres, la ligne de crête du massif rocheux. Sur notre droite s’étale une immense vallée caillouteuse au-dessus de laquelle vibre l’air surchauffée de la fin de matinée. Devant nous, bien tracée, le ruban clair de la piste comme la promesse d’un eldorado. Rouler dans de telles conditions est l’essence même du voyage d’aventure. De grands espaces vierges où l’on se sent seul au monde, et la promesse de « découvertes » exceptionnelles au bout du chemin.
Nous croisons quelques troupeaux de dromadaires, puis de rares campements nomades profitant des pâturages. J’ai toujours été émerveillé par la faculté d’adaptation des humains et des animaux dans ces terres inhospitalières, particulièrement par la relativité de la notion d’abondance quand il est question de pâturages. Ceux-là mêmes que nous imaginons verts et denses sont ici pour nous invisibles qui ne voyons qu’un immense champ de pierres. Mais à y regarder de plus près, de modestes touffes d’herbes sèchent parviennent à s'y développer, suffisantes pour satisfaire l’appétit de petits troupeaux caprins.
 
L’eldorado espéré nous conduit jusqu’à El Hamma. Et comme dans toutes les entrées de villes ici, ce sont des tonnes d’immondices plastiques s’étalant sur des kilomètres, qui nous accueillent. Situation qui n’a fait que s’aggraver depuis des années. Dans ces pays en développement, le monde moderne fait des ravages... Le chantier de nettoyage est immense tout comme le changement de comportement à opérer. Ce qui est possible dans nos sociétés d’abondance mais qui passe en second quand il est juste question de survivre.
 
Assis à déguster une excellente grillade de mouton, nous refaisons le monde sur ces considérations environnementales en regardant passer les gens et les véhicules déglingués.
-               Crois-tu qu’ils soient prêts à envisager de passer rapidement à l’électrique ?
-               Tu parles de quoi ? Des rasoirs ?
 

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