Une soudaine bourrasque soulève dans la
ville un nuage de particules claires, désagréable mélange de sable du désert et
de poussières urbaines. En quelques minutes les terrasses de cafés se vident, tables
et chaises sont mises à l’abri tandis que l’on ferme les portes pour se protéger de
la tempête. Les yeux plissés nous rentrons à notre hôtel heureusement à
quelques pas.
Située à la lisière du Sahara Tunisien, non
loin de la frontière Algérienne, Gafsa nous accueille pour une nuit.
Les presque 300 kms depuis Siliana nous ont remis
dans l’ambiance si particulière du Maghreb profond. Celui des campagnes et des
villages comme immuables. Déjà presque 4 décennies que nous y voyageons régulièrement,
et c’est comme si rien n’avait réellement changé. Partout des hommes désœuvrés
aux terrasses de cafés crasseux le long des routes principales où circulent des
véhicules hors d’âge. Et les femmes discrètes qui tiennent la baraque et que l’on
voit peu.
Bien sûr le Printemps Arabe est passé
par là. Cela force le respect mais pour quel résultat ?
Nous passons sur nos machines de course
tels des extra-terrestres. Que peuvent-ils bien en penser maintenant qu’ils
voient aussi le monde à travers l’écran de leurs smartphones connectés sur les
réseaux sociaux ? A l’évidence ce déséquilibre ne sera pas soutenable bien
longtemps.
La route qui n’en est plus vraiment une
aboutit à un croisement au milieu de quelques maisons où nous arrêtons faire le
point. Impassibles, assis par terre en rang d’oignons à l’ombre d’un mur en
pisé, des petits vieux en djellabas observent la scène. Tels des papillons
attirés par la lumière, quelques enfants se précipitent tandis que des jeunes
adultes lancent des invectives depuis un petit braséro chauffant une bouilloire
en fer blanc. Derrière nos casques et
lunettes de soleil, on échange difficilement quelques mots – la langue
française à quasiment disparu – puis 2 adolescents nous escortent à mobylette jusqu’à
la bonne piste vers le Sud.
Le paysage prend progressivement les
chaudes teintes dorées des zones pré-désertiques. Des bosquets clairsemés résistent
encore. Ici et là de rares tentatives de plantations d’oliviers essaient de trouver
leur place dans cet environnement aride. Dans les fonds d’oued asséchés, d’étonnants
lauriers roses en fleurs apportent une touche de poésie au paysage.
Il fait bon rouler en ce milieu d’après-midi,
portés par cet irrésistible appel du désert, espace de nature brute et de liberté
à nul autre pareil, sauf peut-être la mer.
Nous rejoignons Gafsa. Arrêt au troquet
du coin prendre un thé rouge, simplement profiter du moment et regarder passer
les gens tout en leur volant quelques portraits. Le patron nous escroque sur le
prix du service que nous lui payons en plaisantant sans vraiment négocier.
Presque gêné il nous assure de son bon accueil pour la vie...
Au moment de partir un jeune homme nous
alpague en Anglais :
-
- Quel
âge avez-vous ?
-
- 58
et 60.
Il fait répéter.
Impossible de comprendre les commentaires à ses copains.
A ce moment nous réalisons la
singularité générationnelle de notre road-trip sportif et la chance de pouvoir
encore le faire.
(Désolé, une seule photo faute de réseau.)
1 commentaire:
J'adore ce texte qui décrit si bien ce monde qui ne change pas son mode vie mais qui « apprécie » les touristes avec opportunité non dissimulée
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