samedi 17 novembre 2012

Black tie party



Debout face au grand miroir de la chambre d’hôtel où je suis reçu, me voilà pris d’un doute affreux. L’image qu’il me renvoie a quelque chose de surréaliste, celle d’un grand type élégant en costume noir, chaussures impeccablement cirées, veste fermée sur une chemise blanche à col cassé, boutons de manchette, nœud papillon, et au dessus… ma tête ! Je ne vais tout de même pas descendre comme ça, déguisé en James Bond.
Sauf qu’on n’est pas dans un film et que je suis attendu au bar dans 5 minutes.
Allez, haut les cœurs, ce n’est qu’un « mauvais moment » à passer.

19H28, j’ouvre la porte de la chambre pour me diriger vers l’ascenseur.
Devant moi, un type en costume noir marche d’un pas décidé sur la moquette épaisse du couloir. Tien, son pantalon est un peu court et ses chaussettes « raboulent ».
En entrant dans la cabine nous échangeons un « good evening Sir » convenu. Il n’a visiblement pas l’air surpris de me voir affublé d’un tel accoutrement. Je dois donc être normal dans le contexte.

L’apéritif est servi dans une salle très cosy un peu sombre dans laquelle nous pénétrons par une lourde porte en bois sculpté au seuil de laquelle se tient un chambellan habillé grand siècle anglais, veste rouge brodée, chemise à jabot et pantalon noire bouffant. Au moment de pénétrer dans la pièce il m’arrête avec tact en prononçant un « Sir ? » soutenu par un regard interrogateur. Un instant d’hésitation avant que je ne comprenne qu’il faille me présenter.
-      My name is Grimaud, … Frédéric Grimaud.
-      Sorry ?
Je répète doucement :
-      Fré-dé-ric Gri-maud.
-      Thank you Sir me glisse t-il discrètement, avant de frapper le sol de sa longue canne et d’annoncer à très haute voix à l’assemblée un « Mister Freyedeyeric Gouimaude » aux consonances Shakespeariennes.
Pour une entrée, c’est une entrée…

Il y a déjà là toute une petite société, hommes en smoking et dames multicolores façon sapin de Noël. Je m’approche du bar et commande une vodka-Martini on the rocks, au shaker please. Tant qu’à jouer dans le film, autant y aller carrément.
En fait assez rigolo d’être le français de service, celui qui les a fait bien sourire lors de la conférence de l’après-midi, et que des Moneypenny hors d’âge aiment prendre à partie sur le registre du charme désuet des ladies britanniques. De bon aloi je me prête au jeu, sourires un peu forcés cou serré dans la chemise du smoking. Jusque là tout se déroule bien…

20h15 pile, comme un seul homme les convives se dirigent vers la salle du dîner de gala. Des tables rondes accueillent les invités placés selon un protocole précis. J’ai le privilège d’être assis à la table des Présidents en compagnie d’un écossait en kilt, d’un humoriste connu affublé d’un gilet en soie rouge du plus bel effet sous sa veste de smoking, d’un géant de 2 mètres aux allures de Hulk quand il est gentil, et de quelques personnalités visiblement coutumières de se genre de mondanités si j’en juge par leur généreux tour de taille. Malheureusement pas de James Bond girl à ma table… On ne peut pas tout avoir.

L’humour anglais est heureusement plus savoureux que leur cuisine et le repas se déroule fort agréablement, entrecoupé de remises de quelques distinctions à des professionnels méritants, dans la plus pure tradition britannique.

Minuit passé. Les visages commencent à montrer quelques signes de fatigue. Cols desserrés, vestes déboutonnées, certaines chemises arborant quelques décorations alimentaires.
Et tandis que certains commencent à s’éteindre doucement, d’autres s’esclaffent à grands éclats de voix gutturaux. Il est temps de s’éclipser.
Dommage, sur le parking aucune Aston Martin ne m’attend.

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