mercredi 1 juin 2011

Même pas peur !

A bord du petit jet régional Delta Airlines nous volons vers l’aéroport régional de N.E Arkansas, zigzaguant entre d’énormes cumulonimbus. La nuit noire est striée de spectaculaires éclairs illuminant pour un instant les nuages comme en plein jour, comme si le ciel allait exploser d’un moment à l’autre. Il faut dire que depuis deux semaines les conditions météo sont exceptionnelles dans les états du sud soumis à d’impressionnantes tornades dévastatrices détruisant tout sur leur passage. Plus de 300 morts ! Du jamais vu de mémoire d’homme.
A l’évidence ce vol agité se prolonge quand finalement le commandant de bord annonce :
- Mesdames et Messieurs, comme vous avez pu vous en apercevoir, les conditions météo nous obligent à contourner les nombreuses zones d’orage et nous devons nous dérouter vers Oklahoma City pour refaire le plein.
Soit ! Pas de commentaire dans l’avion, nous sommes aux Etats-Unis. Ici l’autorité du commandant ne peut être remise en cause.
Nous nous posons donc à Oklahoma City sous les trombes d’eau. Il est déjà minuit, nous sommes loin d’être arrivés et demain une très longue journée de 4 rendez-vous qu’il ne faudrait pas manquer nous attend.
45 minutes plus tard nous ré-embarquons.
- Décollage pour un petit vol de 35 minutes annonce le commandant.
Après 20 minutes l’avion recommence à zigzaguer entre les cumulonimbus chargés d’énergie. A travers le hublot je suis ébloui par les flashes incessants de spectaculaires éclairs illuminant les volutes nuageuses obscures, comme des déchirures vers les feux de l’enfer. Puis l’avion commence à s’agiter brutalement. Nous entrons dans une violente zone de turbulence, ballotés par d’impressionnantes embardées de tous côtés, à des angles effrayants, montant ou descendant comme une feuille d’automne au milieu des bourrasques. Cela dure depuis 15 interminables minutes. Dieu sait si j’aime voler et suis confiant en avion, mais je dois sincèrement avouer que là j’ai peur. En cabine les passagers sont également tétanisés, émettant à chaque embardé des cris retenus, quand le commandant resté jusque là étonnement silencieux – il faut dire qu’il avait fort à faire – annonce sans plus de précaution :
- Nous sommes pris dans une violente zone de turbulences et allons ESSAYER de nous poser…
- Essayer, essayer, mais t’as pas le choix mon pote me surprends-je à répondre tout de go !
(Il doit aussi faire chaud dans le poste de pilotage).

Le quart d’heure suivant est du même tonneau si j’ose dire. Je ne peux m’empêcher de penser que finalement nous n’étions pas si mal à Oklahoma City, quitte à louper les rendez-vous. J’ai la gerbe et pense à mes proches en me disant que ce serait tout de même trop bête de finir comme cela.

Au terme de 55 minutes d’un vol mémorable qui n’aurait du être que de 35, les roues touchent finalement le tarmac sous les bourrasques et les hallebardes d’une pluie diluvienne, atterrissage salué par les applaudissements des passagers et un « well done » spontané du pilote à la radio.
Il est 2h30 du matin. La nuit va être courte.

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