mardi 1 décembre 2009

L'âme toute propre...


Tanazenhac, le 30 novembre.

« Dieu a crée l’eau pour purifier le corps et le désert pour purifier l’âme».
Je vous rassure immédiatement, je ne suis pas l’auteur de la jolie phrase.
Il s’agit en fait d’un dicton berbère dont, Jo et moi tentons de percer les mystères.
Alors évidemment tout dépend par quel bout l’on prend le concept en essayant de le mettre à l’épreuve :
Car en effet, ce que ne dit pas le dicton, mais le sous-tend fortement, c’est que l’absence d’eau dans le désert ne permet pas de se laver, et qu’il se pourrait donc bien que le voyageur se retrouve fort sale après quelques jours de pérégrination.
Disons-le tout net. C’est absolument vrai.
Mais alors, que représenterait la saleté corporelle face à la purification de l’âme ?
En fait bien peu de chose. Car, quand t’es dans la désert, t’es un peu tout seul. En tout cas t’es pas nombreux. Quand tu t’ensables par exemple, y’a personne pour venir de donner un coup d’main. Si bien qu’en pelletant, tu te salis le corps en te purifiant l’âme. Vous me suivez ?
Et finalement, ne serait-il donc pas possible de faire les deux choses à fois (se purifier le corps et l’âme) ?
Ben, ce n’est qu’en sortant du désert que tu peux prendre une douche, donc te purifier le corps. Mais comme t’es plus dans le désert tu le salis l’âme…
Bon, il est grand temps que cette histoire se termine car ça finit pas me monter à l’os du cerveau…



A part cela encore une bien belle journée. Et malgré une panne de réveil ce matin – pas grave, on n’est pas aux pièces – nous sommes tranquillement descendus jusqu’à Mhamid par la vallée du Draa, traversant des oasis luxuriantes autour de villages encore préservés malgré la pression touristique montante.

Au départ de Mhamid la piste s’engage vers le Sud-ouest à travers une zone de dunes assez dense, en direction du Lac Iriki, avant de s’incurver vers le Nord jusqu’à Foum Zguid. En tout environ 150 km de terrains variés.
Piégés 2 fois hier par excès de confiance dans la capacité de franchissement de notre Discovery, nous démarrons plus prudemment, anticipant les difficultés avec d’avantage de discernement. Et de ce point de vu, tout c’est passé idéalement.
Tout d’abord une zone de fech mélangé au sable mou, puis le champ de dunes de Chigaga où il s’agit de ne pas perdre la trace pour ne pas s’enfermer au cœur du cordon sans savoir comment en sortir. Vigilants, nous ne relâchons pas notre attention, d’autant qu’un vent assez fort se lève, rendant la visibilité médiocre tout en estompant les traces précédentes.
Dans ces conditions météos particulières, l’Erg ressemble à une mer agitée.
Le vent balaye la crête des dunes dont le sommet s’effiloche en embruns sablonneux. Le champ de dunes est alors vivant, se déplaçant au gré des tonnes de sable déplacées par les rafales tout en émettant un crissement régulier, frottement des grains de sables remontant la pente au vent.

A mi-chemin nous abordons le Lac Iriki, en réalité une très vaste dépression au fond de boue asséchée parfaitement lisse, zone d’aboutissement de plusieurs oueds, inondable en cas de pluie, mais dont l’eau s’évapore tout aussi rapidement sous le soleil intense de cette zone aride.
L’endroit est assez étonnant par son étendu et les mirages qu’il génère, phénomènes étranges et parfois spectaculaires de diffraction de la lumière du au rayonnement thermique du sol surchauffé : des îles semblent alors posées sur d’improbables lacs. De luxuriantes oasis redeviennent de simples touffes de végétation lorsqu’on s’en rapproche. Parfois même des chameaux semblent comme flotter au dessus de l’horizon. Et l’on comprend les hallucinations qu’on pu subir quelques explorateurs épuisés et peu familiers de ces zones extrêmes.
A la sortie du Lac Iriki, un contrôle militaire impose de compléter un grand cahier de passage. Simple formalité où je constate que le dernier passage était celui d’un résidant d’Abu-Dhabi, 6 jours plus tôt, et le précédant un Espagnol voici 11 jours. Pas gènés par le traffic les gars qui vivent ici, enterrés comme des rats à la recherche d’un peu de fraîcheur.



L’arrivée sur Foum Zguid n’a rien de passionnante, vaste zone rocailleuse que les passages répétés de véhicules a transformé en tôle ondulée, et où il n’existe que 2 options pour y rouler en voiture dans un confort relatif, tout en ménageant la mécanique : soit moins de 25 km/h, soit plus de 80. Utilisant la voiture de Flo, nous avons retenue la première.
Foum Zguid est une petite ville sans réelle personnalité, si ce n’est sa position particulière à la jonction de 2 djebels ainsi que le point final de la grande traversée du Sahara Sud-Marocain, depuis Boudnib, via Merzouga puis Mahmid, environ 600 km de désert aux paysages époustouflants.
Sur la place du village, en dégustant un délicieux jus d’oranges fraîchement pressées, on y termine une aventure à la portée de ceux voulant sortir des sentiers battus découvrir de grands espaces encore vierges, tout en se purifiant l’âme…

2 commentaires:

AJFT a dit…

Bonjour!
Enfin un blog bien écrit, intelligent, sensible, modeste, à l'opposé des "aventures sahariennes des ravageurs de dunes". Merci!

Fred Grimaud a dit…

Merci pour ton merci.
Cela fait plaisir de faire plaisir.
Merci aussi à Joelle, Marco, Flo, Africa d'Jo, Olivier, Africa'Did, Renée, Dom, Michel et les autres pour vos petits mots toujours sympas laissés sur le blog, par SMS ou par mel au long de ce voyage.