Pondichéry a comme un goût d’école
primaire, quand le maître de CM1 nous racontait, avec un brin de nostalgie, la
grande aventure des colonies et comptoirs français dans le monde : Afrique du Nord,
Afrique noire, Indochine... C’était beau, grand, loin, exotique, magnifiant l’œuvre
civilisatrice de la France au point de nous convaincre que, décidément, nous
étions le peuple élu.
Confortablement installés dans la
voiture climatisée, de Chennai (ex Madras) nous roulons vers le sud sur la route
côtière du Golfe du Bengale. Impressionnant slalom au milieu d’un intense
trafique d’objets roulants en tout genre. Dehors, la chaleur étouffante fait
vibrer l’air chargé d’humidité. Nous traversons les villages à vive allure dans
un concert de klaxons. Pourvu qu’aucun enfant ne traverse par inadvertance ou
qu’une petite moto familiale, souvent chargée de 3 ou 4 passagers non casqués
ne fasse pas d’écart...
Encore 60 km en un peu plus de 2 heures
indique le GPS. Impossible de tenir une moyenne dans ces conditions. Et
pourquoi devrions-nous ? Nous allons à Pondichéry et le seul fait de s'y rendre est un plaisir indicible.
"Pondicherry" indique la grande pancarte
délavée. Nous y voilà donc. Au premier abord rien de bien différent que les
autres villes traversées. Qu’avions-nous imaginé ? Mais à y regarder de plus
près quelques détails ne peuvent échapper à l’observateur un peu attentif :
« Le Grand Café », une « Epicerie », un pont en béton de
style ce ceux que nous trouvons dans nos villes de provinces, une église, un
cimetière. L’œuvre civilisatrice de la France...
Nous nous dirigeons vers le front de mer
et les indices deviennent plus évidents, plus émouvants aussi. Belles maisons
abandonnées au départ des colons et que les jardins ont envahis au point que des
arbres sortent maintenant des fenêtres, noms de rue aux consonances bien
françaises sur des plaques bleues
émaillées. Plus loin, un monument en hommage aux enfants morts pour la patrie
lors de la première guerre mondiale. Et ces gens qui vous lancent quelques mots
en Français.
En discutant avec Rao qui nous
accompagne pour cette excursion, je l’emmène sur le terrain de ce qui est resté
de « notre » passage. Sans que je ne le force il me répond tout de go
que les anglais sont passés en servant largement tandis que les français ont
aussi apporté. Gentil le Rao. Mais il oubli de rappeler que l’influence
française a été bien moindre... D’ailleurs nous parlons en Anglais.
Ici, comme dans toute l’Inde, le choc
des cultures est unique. Nous sommes en terre Tamoul où se côtoient Sikhs,
Musulmans, Bouddhistes, Indouistes, Chrétiens. Et j’essaie d’imaginer les
surprises et compromis qu’on dut accepter les premiers religieux européens
débarqués ici pour assurer leurs « missions d’évangélisations ».
Entrer dans un temple est une expérience
émotionnelle singulière tant elle bouscule nos repères d’occidentaux. Couleurs chamarrées
des divinités peintes sur les moindres recoins, tout particulièrement Ganesh le
plus sacré du panthéon hindou, petits autels disposés dans des niches dorées
éclairées de bougies, quelques statuts soigneusement disposées ici et là. On y
médite, prie, mange, se marie, dans les senteurs d’encens, de fleurs et de plantes aromatiques. Des prêtres
et autres Brahmanes sont aussi là, parfois torses nus, décharnés et maquillés
qui leur donne d’impressionnants airs d’au-delà. J’avoue avoir du mal à me laisser
transporter spirituellement dans une telle agitation. Mais l’observation attentive de la dynamique qui
se développe en ces lieux uniques, la profonde tolérance qui y règne, ne peut
laisser indifférent.
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