mardi 26 juillet 2022

Pondichéry

Pondichéry a comme un goût d’école primaire, quand le maître de CM1 nous racontait, avec un brin de nostalgie, la grande aventure des colonies et comptoirs français dans le monde : Afrique du Nord, Afrique noire, Indochine... C’était beau, grand, loin, exotique, magnifiant l’œuvre civilisatrice de la France au point de nous convaincre que, décidément, nous étions le peuple élu.
 
Confortablement installés dans la voiture climatisée, de Chennai (ex Madras) nous roulons vers le sud sur la route côtière du Golfe du Bengale. Impressionnant slalom au milieu d’un intense trafique d’objets roulants en tout genre. Dehors, la chaleur étouffante fait vibrer l’air chargé d’humidité. Nous traversons les villages à vive allure dans un concert de klaxons. Pourvu qu’aucun enfant ne traverse par inadvertance ou qu’une petite moto familiale, souvent chargée de 3 ou 4 passagers non casqués ne fasse pas d’écart...
Encore 60 km en un peu plus de 2 heures indique le GPS. Impossible de tenir une moyenne dans ces conditions. Et pourquoi devrions-nous ? Nous allons à Pondichéry et le seul fait de s'y rendre est un plaisir indicible.
 
"Pondicherry" indique la grande pancarte délavée. Nous y voilà donc. Au premier abord rien de bien différent que les autres villes traversées. Qu’avions-nous imaginé ? Mais à y regarder de plus près quelques détails ne peuvent échapper à l’observateur un peu attentif : « Le Grand Café », une « Epicerie », un pont en béton de style ce ceux que nous trouvons dans nos villes de provinces, une église, un cimetière. L’œuvre civilisatrice de la France...
Nous nous dirigeons vers le front de mer et les indices deviennent plus évidents, plus émouvants aussi. Belles maisons abandonnées au départ des colons et que les jardins ont envahis au point que des arbres sortent maintenant des fenêtres, noms de rue aux consonances bien françaises sur des plaques bleues émaillées. Plus loin, un monument en hommage aux enfants morts pour la patrie lors de la première guerre mondiale. Et ces gens qui vous lancent quelques mots en Français.
En discutant avec Rao qui nous accompagne pour cette excursion, je l’emmène sur le terrain de ce qui est resté de « notre » passage. Sans que je ne le force il me répond tout de go que les anglais sont passés en servant largement tandis que les français ont aussi apporté. Gentil le Rao. Mais il oubli de rappeler que l’influence française a été bien moindre... D’ailleurs nous parlons en Anglais.
 
Ici, comme dans toute l’Inde, le choc des cultures est unique. Nous sommes en terre Tamoul où se côtoient Sikhs, Musulmans, Bouddhistes, Indouistes, Chrétiens. Et j’essaie d’imaginer les surprises et compromis qu’on dut accepter les premiers religieux européens débarqués ici pour assurer leurs « missions d’évangélisations ».
 
Entrer dans un temple est une expérience émotionnelle singulière tant elle bouscule nos repères d’occidentaux. Couleurs chamarrées des divinités peintes sur les moindres recoins, tout particulièrement Ganesh le plus sacré du panthéon hindou, petits autels disposés dans des niches dorées éclairées de bougies, quelques statuts soigneusement disposées ici et là. On y médite, prie, mange, se marie, dans les senteurs d’encens, de fleurs et de plantes aromatiques. Des prêtres et autres Brahmanes sont aussi là, parfois torses nus, décharnés et maquillés qui leur donne d’impressionnants airs d’au-delà. J’avoue avoir du mal à me laisser transporter spirituellement dans une telle agitation. Mais l’observation attentive de la dynamique qui se développe en ces lieux uniques, la profonde tolérance qui y règne, ne peut laisser indifférent.
 
 
 

Aucun commentaire: