jeudi 23 juin 2016

L'Amérique, mais laquelle ?



Il y a parfois de jolies brèves de comptoir qui méritent d’être comptées.

Cela se passe au coin d’un improbable bar d’hôtel, quelque part en Amérique du Nord, là où les hommes d’affaire et autres représentants de commerce se retrouvent avant le dîner pour boire une bière dans une informelle convivialité dont les américains ont le secret.
On échange alors quelques mots sur l’air du temps et ses origines, dans un pays où les racines permettent d’afficher son appartenance à la communauté portant haut la bannière étoilée.
A ma gauche le gars est Américain, fier de ses racines Texanes.
Je me présente comme Français ce qui fait réagir mon voisin de droite qui ne situe pas vraiment la France en Europe. Et d’ajouter sans complexe :
-       Tu sais nous c’est l’Amérique d’abord !
C’est alors qu’un troisième gars intervient spontanément comme un joker sortant de sa boite.
-       L’Amérique, de quelle Amérique parlez-vous les gars ?
Surpris, tous les regards convergent alors vers lui, ce qui je crois était l’effet attendu.
-       Ben oui les gars, moi aussi je suis Américain. Mais du Canada. Et regardez là-bas – pointant du doigt un beau poupon dépassant largement le quintal en train de siroter un Coca – et bien lui aussi est Américain, mais probablement du Mexique. L’Amérique les gars, ce n’est pas que les Etats-Unis, et heureusement…
La seconde qui suit est comme suspendue aux réactions des types assis autour moi. Un instant je crains l’incident, le temps pour l’auditoire de reprendre une gorgée.
-       Comment tu t’appelles mon gars ? lui demande un autre solide gaillard accoudé sur le Zinc, dans un costume élimé trop grand.
-       Gratien, Américain Canadien du Québec.
-       Okay, okay Gratien, t’as pas tort. Sauf que dans le rêve Américain, l’Amérique c’est la nôtre.
-       Pas complètement faux les gars, et l’assistance de partir alors dans une franche rigolade.

Du coup je ne résiste pas au plaisir d’échanger quelques mots en Français avec cet Américain francophone, digne représentant d’une communauté sous pression culturelle, et fier de revendiquer crânement sa différence.


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