Paris -
Buenos Aires, plus de 13 heures de vol de nuit, longue diagonale sur la petite
planète où l'on croise l'équateur, change d'hémisphère et passe sans transition
du printemps à l'automne.
Les
premières lueurs de l'aube australe ont quelque chose de différent, une
transparence un peu crue donnant aux couleurs des reliefs à nuls autres
pareils.
L’hiver
approche et les filles portent de jolis pulls en laine colorée.
Un café ;
même si je n'en bois jamais. Il a ici une saveur particulière, couleur d'encre
mais d'une douceur exquise que je déguste avec un sandwich
jambon-fromage-salade.
Assis à
la terrasse d'un petit bar je profite de l'air vif de ce début de journée quand un
bus passe dans la rue : "Aconcagua express line". Mon cœur s'emballe
en repensant à l'expédition de l'an dernier et je ne peux m'empêcher
d'esquisser un petit sourire en revoyant quelques images. (Cf. récit de l'aventure dans les archives du blog en remontant à février 2012).
...
Rosario,
sur les rives du fleuve Parana.
Avec
quelques uns de mes coéquipiers brésilien, américain et canadien, je participe
au lancement de notre nouvelle marque mondiale en génétique porcine
"Choice Genetics", avant première en collaboration avec notre
dynamique distributeur Argentin : réception parfaitement organisée,
présentations bien rodées, très bonne ambiance.
C'est le
break de fin d'après-midi et je m'échappe un peu du brouhaha pour profiter de
l'environnement exceptionnel.
La grande
terrasse du lieu de la manifestation donne sur le fleuve qui selon les gens du
coin serait ici le plus large du monde, s'étalant sur 45 km entre d'étroites
bandes de terre... Quoi qu'il en soit le volume d'eau qui s'écoule est
impressionnant, force tranquille de millions de m3 descendant doucement du cône
sud, alimenté par les pluies tropicales du Brésil et du Paraguay.
Quelques
oiseaux exotiques s'ébattent dans les arbres longeant la berge, sifflements
inhabituelles pour des oreilles d'européen.
Je ferme
les yeux pour profiter de l'instant en prenant quelques grandes respirations,
quand des images de montagnes me traversent de nouveau l'esprit. Pour tout dire,
depuis plusieurs mois elles ne me quittent plus vraiment, depuis la descente du
sommet de l'Aconcagua, une petite voix lancinante qui me pousse vers d'autres
cimes, et ce nom mythique qui tourne en boucle, devenu nom commun quand il
s'agit de qualifier l'impossible : Everest. Et j'ai beau me raisonner, me dire
que ça n'a pas de sens, que ce n'est pas pour moi, tenter de rationaliser les
risques / bénéfices, mais rien n'y fait. J'en ai le ventre noué comme aux
meilleurs moments de cette addiction aux déserts qui m'avait touché il y a bien
longtemps, suite à une première
expédition saharienne montée après avoir acheté à la boutique du coin, sur un
coup de cœur, la carte Michelin de l'Afrique l'Ouest et ses immenses étendues
de sables jaunes aux noms évocateurs comme « Grand Erg Oriental » ou
encore « Tanezrouft ». Ce sont aujourd'hui d'autres mondes bruts et minéraux
qui me font frissonner : Himalaya, et l'un de ses sommets mythiques, le
Cho-Oyu, 8300 m, objectif "raisonnable" à tenter l'an prochain avant,
peut-être, d'envisager l'impossible.
Le soleil
se couche. Un cargo orange descend tranquillement le courant vers l'estuaire du
Rio de la Plata, presque une mer intérieure entre Buenos Aires et Montevideo.
Doucement
quelques bancs de brume s'élèvent sur le fleuve.
On
m'appelle. Allez, il faut y retourner, le boulot n'est pas encore terminé pour
aujourd'hui.
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