mardi 8 septembre 2009

Jet Lag


Dimanche 11h25, j’embarque sur le petit vol Nantes-Paris pour attraper à Charles de Gaule la connexion du AF128 vers Pékin : vol intercontinental de jour. Je n’aime pas ça, mais c’est le seul moyen de prolonger autant que possible le week-end tout en arrivant lundi matin pour le premier rendez-vous de la semaine.
Juste 10 heures de vol plus tard, après avoir avalé 6 fuseaux horaires le long du bel arc dessiné vers le nord de l’Europe, puis redescendant doucement à travers la Russie, enfin la Mongolie en passant à la verticale de Hulan Bator, le triple 7 se pose au petit matin à Pékin. Un vol sans histoire, comme des centaines d’autres pareils, « coincé » dans mon siège éco entre le dossier de devant en position « couchette » et la voisine de droite, heureusement une fluette femme chinoise.
Je suis dans la glue, encore assommé par le somnifère qui n’a rien su faire d’autre, mais rattrapé par mon biorythme naturel : il est ici un peu plus de 5h30 du matin, pas encore minuit à la maison, et la journée ne fait que commencer…
Comme un zombi je sorts de l’avion armé de mes bagages à main, sac à dos et valise à roulette au standard cabine, pour rapidement me diriger vers le contrôle d’immigration, marchant d’un pas soutenu en tentant d’émerger de ma torpeur.
A cette heure matinale l’aéroport est quasiment vide. Seuls quelques agents de services en uniformes marines, teint gris et yeux rougis, terminent leur horaire.
Nonchalamment nous passons à travers les portiques de contrôle de température - H1N1 oblige - curieusement hors service. En cette heure matinale le service de la santé dort encore.
Presque personne à l’immigration. Tandis que je prends une file « Chinese nationality » où il n’y a encore personne, une jeune femme derrière moi m’interpelle :
- Are you Chinese ?
Je lui réponds gentiment :
- Yes I’m this morning.
Nous échangeons un sourire. Elle n’insiste pas.
En sortant mon passeport pour le contrôle, allez savoir pourquoi, je me prends à essayer de recompter les fois où je suis entré dans le pays : déjà le 3ème voyage cette année et j’y viendrai encore 2 fois jusqu’à décembre, mais c’est exceptionnel. Disons entre 2 et 3 fois l’an en moyenne depuis 1992. J’en serais donc à une cinquantaine de voyages… Je n’arrive pas y croire. Et tandis que mon esprit embrumé essaie de recompter, je suis interpellé par l’agent pour les formalités.
Vite fait, bien fait. En quittant le comptoir, j’appuie machinalement sur le bouton sourire du boitier d’évaluation de satisfaction de la procédure d’enregistrement des étrangers entrant dans le pays. C’est vrai qu’ils sont efficaces et rapides. Le chiffre indique un peu plus de 80 000 depuis la mise en service de la petite boite.
Hagard je traverse l’aéroport pour m’engouffrer dans un taxi noir « Red Flag », copie des Audi 100 des années 80, indiquant au chauffeur « Yuyang Hotel ». Dehors il pleut.
Une demi-heure plus tard nous sommes devant l’hôtel. Sans m’en rendre vraiment compte je me fais voler par le chauffeur : 4 fois le prix habituel ! Avant que je ne réagisse il est déjà parti…
6h15 : j’enregistre au comptoir de l’hôtel avant de rejoindre la chambre 2101. Il me reste 2 heures pour dormir puis prendre une douche avant de retrouver les collègues au lobby pour le petit déjeuner. Par précaution j’envoie un SMS à Huang Shi, notre représentant local, pour qu’il s’assure bien de mon réveil puis m’allonge sur lit. Quelle délicieuse sensation que de pouvoir s’étaler enfin de tout son long. Mais le sommeil ne vient pas tout de suite. A peine endormi mon téléphone sonne. C’est Huang me demandant si je suis bien arrivé et si tout va bien. Evidemment que ça va ! Tu parles…
Rasé et lavé je descends « du shampoing plein les yeux ». Rapide petit dej, briefing sur le programme et les objectifs de la journée puis nous montons dans le taxi pour le rendez-vous. Deux heures de voiture à trois sur la banquette arrière. C’est un peu serré. J’essaie néanmoins de me relaxer en cherchant des séquences de micro-sommeil. J’avais appris des trucs de marin à ce sujet, mais aujourd’hui ça ne veut pas marcher.
Nous arrivons à notre lieu de rendez-vous un peu avant 11h. Docteur Lee nous accueille avec un de ses collègues. De taille moyenne, brin aux cheveux raides, visage rond et souriant illuminé d’yeux pétillants étonnamment ouverts pour un Chinois, la petite 40aine, il parle un excellent anglais développé dans une université américaine.
C’est alors qu’en fin de matinée me prend une irrésistible envie de dormir. Je lutte mais mes paupières sont d’une incroyable lourdeur et rien n’y fait. Le regard flou, la tête dodelinant je n’aspire qu’à une chose : DORMIR ! Tant et si bien que je donnerai n’importe quoi pour fermer les yeux et poser ma tête sur la table comme les enfants à la maternelle. En réalité je suis plus au rendez-vous, mais ailleurs, dans un état second, luttant contre moi-même dans une implacable torpeur dont je n’arrive pas à sortir. Rien n’y fait : boire du thé en quantité, me lever de ma chaise, aller deux fois aux toilettes où je m’endors un instant… Ce rendez-vous est un calvaire ; heureusement que mes collègues font le boulot. Je suis d’autant plus gêné qu’il est tout à fait évident qu’ils se sont aperçus de la situation et qu'habituellement je résiste plutôt très bien au décalage horaire. Mais cette fois-ci je n’y peux rien malgré toute ma volonté, ou le peu qu’il m’en reste…
Vers 13h break déjeuné. Des plateaux repas pris sur place. Manger m’apporte un court répit mais je replonge aussitôt. Je n’en reviens pas mais n’y peux vraiment rien. Et ces discussions qui n’en finissent pas... Je loupe des séquences tout en essayant de faire bonne figure. Quelle épreuve ! Toute mon attention est mobilisée pour ne pas m’effondrer comme une loque. Par 2 fois c’est moins une !
Finalement nous terminons, je devrais plutôt dire, ils terminent, par un accord de principe. Nous nous quittons tout sourire. En serrant les mains, je suis obnubilé par la possibilité de m’assoir enfin les yeux fermé à l’arrière du taxi. Les portières claquent, je plonge aussitôt dans un sommeil perturbé par des rêves hallucinatoires où toutes sortes de choses se mélangent.
Huang me réveille gentiment en arrivant à l’hôtel. Il me faut quelques secondes pour reprendre pieds et réaliser où nous sommes.
Dans un demi-sommeil je file aussitôt vers ma chambre avant de m’effondrer enfin sur le lit pour la nuit !

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Fred,

Je compte organiser prochainement à la maison une soirée entre coupée de siestes dans mon super canapé en cuir je compte sur toi. Entre 2 siestes on parlera voyages ...
Bye bye
Africa'Did

Anonyme a dit…

On y compte bien... d'essayer le canapé !
Africa'Fred

Unknown a dit…

Salut Fred !

La Dom m' avait parle de ton blog mais honnetement je n' avais pas encore regarde, c' etait l' ete, les vacances, les amis, pas de temps pour le virtuel..Maintenant que l' automne est vraiment la et que la vie s' organise plus a l' interieur, les envies d'ailleurs commencent a fremir et on se retrouve a tapoter fieveusement en revant son clavier a la recherche de nouveaux horizons. Mais ou commence le voyage ? Dans tes reves d' enfants, sur les cartes de l' atlas, a travers des lectures ou dans l' histoire familiale ? Ou a la lecture d' un blog drolement bien fait ? En tout cas, une chose est sure: toi, tu es tombe dedans quand tu etais petit !!! Et c' est une potion sacrement forte, dont on se passe difficilement. J' ai donc lu le blog et passe de bons moments, tasse de the a la main. Bravo donc pour l' ecriture d' abord, le ton est juste, le style est bon, c' est a la fois informatif et humain, humoristique et il n' y a pas de fautes de grammaire !( ce qui est toujours agreable pour les amoureux de la langue)et ca donne a fond l' envie de partir !!! Je reagis a ton histoire de jetlag.Moi-meme etant victime de ce phenomene regulierement, je comprends ta lutte. C' est epouvantable cette force qui te terrasse de sommeil.Si c' est vraiment la premiere fois que ca t' arrive, tu as echappe au regard batracien pdt toutes ces annees, rejouis-toi ! Personnellemnt, il me faut tjrs un jour ou deux, voir trois, pour emerger completement et retrouver un rythme " local" optimise. Moralite: je ne fais rien a mon arrivee, mais bien sur, je ne suis pas en voyage d' affaires comme toi. Anyway, merci pour cet episode qui te replonge dans la meme categorie que nous tous, humaine tout simplement, avec nos faiblesses.
Un grand bonjour a toute la sympathique famille Grimaud !
Bien amicalement,
Joe
ps: excuses le manque d' accents, j'utilise un clavier qwerty.