Les rendez-vous s’enchainent d’une
ville à l’autre, comme les escales d’une course à étapes.
Et partout ces gens qui s’affairent, se
croisent en s’ignorant, les yeux rivés sur leur smartphone à courir derrière le
temps. Comme si le monde n’avait plus d’importance qu’à travers cette petite
lucarne déformante qui donne le teint blafard.
Passer d’une saison à l’autre, d’un
climat à l’autre, sauter les fuseaux horaires, apprécier de nouvelles cuisines…
Changer de langue et de cultures dont les subtilités nous échappent. Perdre la
notion d’espace-temps pour ne se concentrer que sur l’action du moment. Tenter
de reprendre son souffle pour que le corps tienne la distance, gérer
l’éloignement d’avec les siens, et pourtant se dire que l’on a bien de la
chance de faire ce boulot.
…
Vous-vous souvenez de moi ? me
lance, tout sourire, un petit homme barbu en me serrant chaleureusement les
deux mains.
Devant mon « amnésie »
évidente il resitue l’action :
Oui, c’était il y a 10 ans au Pakistan,
à l’aéroport de Karachi. Il y avait des émeutes et nous vous avions évacués
d’urgence par les sous-terrain sous les terminaux.
Les souvenirs me reviennent alors en
bribes : le lendemain de la fête des 10 ans d’activité d’un gros client,
des échauffourées avaient démarré avec je ne sais quelle minorité. Quelques
coups de feu tirés, des bus utilisés comme béliers ou boucliers par les
« rebelles », bref, l’ambiance n’était pas au beau fixe et l’on ne
voulait prendre aucun risque avec nous.
Branle-bas de combat, embarquement dans
des véhicules militaires – si mes souvenirs sont exacts – et direction
l’aéroport.
En arrivant les choses se gâtent. L’accès
à la zone internationale est bloqué. On entre dans donc la zone domestic,
descendons dans les sous-sols techniques pour ressortir du labyrinthe
directement en salle d’embarquement pour Dubaï. Trente minute plus tard l’avion
décollait.
Encore hilare au souvenir de cette
aventure, le visiteur inattendu me propose un selfie avant de poursuivre son
chemin dans allées bondées du salon de Bangkok en lançant un joyeux « see
you again soon ! »
Tandis qu’un groupe de Vietnamien
débarque sur le stand, des Indonésiens profitent des croissants disposés sur
les tables, tout en regardant les jolies vidéos réalisées par notre service
marketing. A l’autre bout du stand, des Thaïlandais partagent leur expérience
de nos crevettes avec des Indiens, et des Coréens reprennent contact après la
fin des embargos liés à la grippe aviaire. Seuls les Chinois fond un peu grise
mine suite aux effets dévastateurs de la fièvre porcine africaine sur leurs
filières de production.
Partout nos équipes s’affairent pour ne
manquer aucune opportunité commerciale.
Pas de doute, s’il est une région du
monde où les choses se passent, c’est bien ici.
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