dimanche 4 mars 2018

Le Louvre d'Abu Dhabi



Installés dans notre canapé nous regardions les informations lorsqu’il fut question de l’inauguration du Louvre d’Abu Dhabi. Nos regards se sont croisés, et sans parler nous sommes dits qu’il fallait y aller voir tant l’impression donnée par le court reportage était forte : au cœur d’un Moyen-Orient tellement tourmenté, un havre de paix dédié à l’art universel.
Que des hommes de là-bas l’aient imaginé était comme une géniale étincelle.
Qu’ils soient allés jusqu’à sa concrétisation lui donne une dimension peu commune, dépassant tous les aprioris, pour mettre en lumière ce que les Hommes ont en commun de plus beau, cette capacité de générer des émotions gratuites à partir de leurs créations.

4 mois plus tard nous y voilà donc, heureux d’être là, parmi les « premiers privilégiés » à découvrir cet endroit si singulier conçu par l’architecte Jean Nouvel.
9 ans de travaux pour édifier un ensemble contemporain unique, à lui seul un chef d’œuvre : dôme d’acier et d’aluminium tressés laissant passer l’air et la lumière, sous lequel sont organisés les modules rectangulaires présentant les œuvres, le tout entouré des flots turquoises du Golfe Persique. L’impression ressentie est d’une rare intensité, magnétisme attirant les visiteurs jusqu’à les absorber complètement.
En entrant on se sent immédiatement protégé des affres du monde, immergé dans une dimension où l’esthétique et l’émotion vous enveloppe tout entier. Puis l’on est transporté dans la grande frise chronologique, sobrement mise en scène, depuis les premiers objets de l’ère préhistorique, jusqu’aux plus récentes œuvres contemporaines. Tenter de les décrire n’aurait pas grand sens. Il faut pouvoir les regarder en vrai pour en ressentir toute la puissance émotionnelle. Mais la magie est ailleurs, dans la convergence artistique et spirituelle de cultures pourtant si différentes.
D’Europe, du Moyen-Orient, d’Asie et d’Amériques, cette manière qu’on (eut) les hommes de rechercher et représenter Dieu, d’imaginer l’au-delà, tenter de comprendre l’univers, développer leur zone d’influence, montrer leur pouvoir, maîtriser leur environnement, provoquer des émotions… comme si, d'où que nous soyons, quelque chose de supérieur nous reliait plutôt que nous différenciait.  

Flâner parmi toutes ces œuvres à quelque chose de fascinant, presque étourdissant. On marche lentement pour suivre le fil de cette histoire de l’humanité au long de laquelle quelques personnalités singulières se sont exprimer de manière originale, laissant aux générations future des créations artistiques de leur époque : ici un biface d’apparat en silex, plus loin une urne funéraire précolombienne, un sarcophage Egyptien, un Coran enluminé, une Bible millénaire, une Torah, des textes Bouddhistes, des jarres Chinoises d’une incroyable finesse, des statues antiques aux proportions parfaites, un paravent Japonais subtilement calligraphié, des tableaux de peintres classiques Européens montrant avec force détails la vie de leur époque, des portraits de personnalités dont l’un, saisissant, de Voltaire irradiant toute l’intelligence du philosophe, pour terminer devant d’abstraites et multicolores œuvres contemporaines.

Attiré par les puits de lumière, on s’approche régulièrement des larges bais vitrées donnant sur la grande halle merveilleusement illuminée par les rayons du soleil traversant, tels des rayons laser, l’enchevêtrement de la structure métallique couvrant les salles d’exposition.
Puis l’on sort des salles pour retrouver la caresse de l’air tiède circulant sous le dôme, agréable sensation de plénitude parmi tous ces gens venus du monde entier partager un moment hors du temps et des cahots du monde.
Croiser ces regards est un moment de grâce absolu où chacun se sent membre de la même communauté des Hommes, ceux-là mêmes à l’origine de toutes ces merveilles laissées en héritage aux générations futures.

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