dimanche 29 avril 2012

Real Politik

Petit saut en Allemagne aujourd’hui considérée comme le pilier économique de l’Europe (et par là même politique) chacun y allant, en cette période de crise économique et d’élection présidentielle chez nous, de ses références à notre puissant voisin considéré comme le modèle à suivre…
Au terme d’un vol matinal turbulent « mon » avion se pose à Düsseldorf. Je retrouve mes co-équipiers et nous roulons vers l’Est pour rejoindre le siège social d’un important opérateur des filières volailles avec lequel nous avons rendez-vous. Trafic intense sur l’autoroute, entre le flux ininterrompu des camions sillonnant l’Europe sur la file de droite et les puissantes berlines et autres Porsche déboulant à haute vitesse tous feux allumés sur la file gauche, circulation régulièrement ralentie par les zones de travaux au sortir de l’hiver.
De part et d’autre de l’autoroute la campagne est ponctuée de champs d’éoliennes et de fermes impeccablement tenues, presque toutes équipées d’installations photovoltaïques auxquelles s’ajoutent souvent une unité de bio-méthanisation.
Ici, en moins de 10 ans, la production privée d’énergie est devenue un business dont les agriculteurs se sont forts opportunément emparés. Sur cette même décade, la production agricole a connu un développement extraordinaire, juste dividende du courageux choix de la réunification qui, après une période de flottement et de restrictions, a ouvert de nouvelles perspectives de développement à la grande Allemagne dont l’agriculture est l’une des plus efficaces illustrations : nouveaux espaces, main d’œuvre disponible et relativement bon marché, volonté politique. Alors on y va de manière pragmatique.
Et c’est comme cela qu’en 10 ans l’Allemagne est en train de nous rattraper, pour ne pas dire dépasser, sur ce secteur dont nous (les français) nous targuions pourtant d’être les champions d’Europe à côté d’un voisin Germanique considéré comme le champion de l’industrie. Nous avions « perdu » le match de l’industrie mais nous contentions de la situation en « sauvant l’honneur » grâce à nos filières agro-alimentaires. Et bien force est de constater que cet équilibre industrie / agriculture de chaque côté du Rhin est en train de tourner à l’avantage de nos voisins y compris pour l’agriculture !
Et nous n’avons rien vu venir, englués dans des querelles de clochers sur les questions environnementales et autres lourdeurs administratives bien souvent stériles.

Discussion dense et chaleureuse avec notre interlocuteur. Tous les points sont évoqués de manière efficace, en totale transparence apparemment.
En fin d’entretien notre hôte aborde avec tact le résultat du premier tour de nos élections présidentielle. Après la question de savoir qui de Nicolas Sarkozy ou François Hollande sera notre prochain Président, il prend un air plus grave en évoquant le score préoccupant de l’extrême droite à un peu moins de 20% des voix et surtout près d’un vote sur deux chez les jeunes entre 18 et 24 ans.
Je ne peux que confirmer ma consternation face à cette triste réalité du vote « massif » pour un parti soutenant des thèses isolationnistes, xénophobes et rétrogrades de la pire espèce, pas fière de ce qui passe « chez nous ».
- Vous savez ajoute t-il, au milieu des années 30, dans un contexte de crise économique sans précédent, les extrémistes ont prospéré chez nous avant de prendre le pouvoir de façon démocratique dans un premier temps. Incidemment le centre modéré s’est déplacé vers la droite bien pensante qui du coup a elle-même dérivé vers de dangereux extrêmes… Et cela nous a conduits au pire sans que la majorité ne s’en aperçoive, au moins dans un premier temps.
Nos regards se croisent sans plus de commentaire.
Je contiens ma colère, plus convaincu que jamais que notre entreprise a un rôle à jouer dans le développement et la promotion d’un modèle social ouvert et multiculturel auprès des hommes et femmes qui accompagnent notre aventure industrielle à travers le monde.

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