mardi 23 août 2011

Petite conversation sur l'économie du monde...

Bangkok est l’une de ces villes étouffantes où se précipitent en masse les touristes. Je me suis souvent demandé pourquoi, alors qu’il y a tant de lieux de villégiature tellement plus agréables.
Certes il y a le soleil « garanti », l’exotisme bon marché d’une Asie amicale et accessible bien orchestré par les tours opérateurs, les fantasmes de certains hommes… et aussi cette propension qu’on les humains à se regrouper ; dans les villes pour travailler où sur la plage de Saint de Mont pour les vacances. Alors pourquoi pas Bangkok en effet ?

Après les Européens de l’Ouest, ce sont maintenant les Russes qui débarquent en masse. Non pas la riche nomenklatura, ceux que l’on retrouve dans les palaces Parisiens, Londonien, de Nice ou Monaco, mais la classe moyenne, « populaire », tous ces gens pour qui un tel voyage représente déjà une aventure, loin de leurs repères habituels, totalement assistés dans un « tour package » sans surprise où ils en auront pour leur argent.



Terminant la discussion business de notre rencontre, mon interlocuteur - que j’appellerai Robert - et moi nous attablons pour un rapide déjeuner au restau Italien du coin. Pourquoi se priver de valeurs sûres à l’autre bout du monde. Spaghetti aux fruits de mer, peut-être pas très original mais vraiment délicieux. Tandis que nous devisons sur l’état de l’économie mondiale, entre un gros Russe bruyant accompagné d’une « poupée » locale, presqu’une enfant. Ca me coupe l’appétit…
Nous devisions donc sur l’économie mondiale ne pouvant que constater le marasme dans lequel s’englue le monde dit développé face à la montée en puissance de pays émergeants, et le déplacement du centre de gravité vers l’Asie. Evidemment indiscutable cette tendance lourde amenait Robert à quelques remarques intéressantes. La quarantaine rondouillarde, cheveux roux vifs et peau claire, Robert est Américain d’origine Irlandaise mais vit en Asie depuis maintenant 18 ans ; d’abord au Vietnam où il a rencontré sa femme puis maintenant en Thaïlande avec leurs 2 jeunes enfants. Ce métissage culturel lui donne un point vu intéressant sur la marche du monde qui bien que subjective mérite attention.
- Tu sais me dit-il en substance, je ne suis pas si optimiste que cela concernant les économies émergeantes, et pas si pessimiste que cela concernant l’Europe et les USA. Il reste aux pays émergeants encore énormément de chemin à parcourir.
Et tandis que j’opine, d’ajouter :
- Les racines profondes, la culture générale, l’ouverture ou monde, ils sont encore loin. Bien sûr ils voient leurs conditions matérielles s’améliorer, mais il reste une importante marche à franchir.
J’étais en Angleterre il y a quelques semaines. Dans une usine de transformation de volaille je discutais avec les opérateurs. Et il me rappelait ce que nous leur devions à eux, les « ouvriers ». Et bien tu vois, ici ça peut pas arriver. Faute d’éducation les gens sont trop dociles au travail. Ils exécutent mais ne réfléchissent pas. Une bêtise, même s’ils la voient, ils la reproduiront 100 fois si personne ne leur demande de corriger, de peur de prendre une initiative malheureuse.
- Et où veux-tu en venir ?
- Et bien je veux dire qu’en Europe ça n’arrive plus. Les gens revendiquent, manifestent, protestent en défendant leurs prérogatives – là les français vous êtes champion du monde – mais sont concernés par ce qu’ils font, le font savoir et veulent en toucher les dividendes. C’est toute la différence. Et tu vois, nous en sommes encore ici au « servage ». Quelques dirigeants d’entreprises « intelligents » l’ont bien compris et en profitent, voir en abusent à leur avantage. C’est ce qui se passait en Europe il y a un siècle.
- Je suis d’accord, mais en quoi cela doit nous permettre de rester optimiste de l’autre coté du monde ? Car il est bien évident qu’ils n’en resteront pas là.
- Et bien tu vois, nous sommes ici l’usine du monde ou des centaines de millions de petits bonshommes exécutent en masse des taches de bases à faible valeur ajoutée. Le seul avantage se situe au niveau du coût horaire. « L’intelligence » est encore de l’autre coté du monde, là où sont imaginés et conçus tout ces produits et services innovants.
- C’est vrai lui dis-je, mais en même temps tous ces petits bonshommes s’enrichissent, consomment et contribuent à faire tourner la machine économique.
- D’accord ajoute Robert, le concept d’Henri Ford, faire que ses propres ouvriers deviennent ses meilleurs clients. Et pendant ce temps là, pendant qu’ici nous produisons, en Europe et aux USA de plus en plus de gens prennent le temps de réfléchir et d’inventer l’avenir. A ton avis où se trouve la vraie valeur ajoutée ?
- Tout à fait d’accord avec toi Robert, encore faut-il que chacun en ait bien conscience et veuille faire l’effort d’aller dans cette voie de la valeur ajoutée par l’innovation, la culture, la formation, l’effort intellectuel !
- Hé Fred, que faites-vous dans votre Groupe ? Que viens-tu me vendre ? Des canards, des poulets, où le travail génétique que vous y faite ?

Je réponds d’un sourire entendu, et sur ce nous concluons le rendez-vous.

Repartant vers mon hôtel je me dis que nous tenons là un partenaire convaincu et que peut-être notre groupe est sur une bonne direction.

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