samedi 4 septembre 2010

Même pas mal !

Ciel étrangement lourd sur Qingdao. D’un gris menaçant, la masse nuageuse compacte dessine d’énormes arabesques comme des coulées de lave refroidies, recouvrant la ville d’une sinistre chape de plomb qui ne dit rien de bon qui vaille. Comme si le diable en personne jouait avec les éléments.
Sur la plage le sable a pris l’allure de la cendre, tandis que la mer d’huile devenue pétrole semble s’engluer dans d’épaisses et lentes ondulations que la moindre étincelle pourrait faire exploser.
Deux typhons ont rasé la côte ces derniers jours avant l’aller se dégonfler dans la Mer de Chine, et l’on en annonce un troisième pour cette nuit. Le calme avant la tempête…
Il est 19h. Dans cette atmosphère pesante, un vieux bonhomme s’affaire au bord de l’eau. Il fait déjà nuit noire et je ne parviens pas à distinguer ce dont il s’agit. Un petit garçon le rejoint. Intrigué et curieux je tente de comprendre. Sont-ils en train de pêcher ?
Par intermittence apparaît une lueur furtive. Puis un halo de lumière plus régulier éclaire leur petite activité, dessinant en contre jour de frêles silhouettes projetées sur la plage en ombres chinoises.
C’est alors que la lueur s’élève lentement dans le ciel d’encre, suivie par une autre quelques instants plus tard. Je m’approche doucement. Une troisième lueur s’élève encore avec grâce, petits ballons de papier de soie à l’intérieur desquels une bougie génère l’air chaud nécessaire à la sustentation. Instant de grâce absolue entre le vieux monsieur et le petit garçon dont le regard semble comme hypnotisé par l’envol de ces éphémères et frêles esquifs, poétique message de clémence adressé aux éléments.
Sous le charme je rentre à pied à mon hôtel.

Réveil programmé à 5h30, assis sur le lit je traite quelques e.mails avant d’adresser le compte rendu de suivi du rendez-vous de la journée à mes équipiers. Quelques pages de mon livre du moment : « La Marche dans la Ciel » d’Alexandre Poussin et Sylvain Tesson, puis je tente de m’endormir malgré un léger jet-lag.
Vers 3 heures du matin réveil en trombe… d’eau. Comme si des seaux entiers étaient projetés avec violence contre la fenêtre de ma chambre. Dix-sept étages plus bas, dans la rue les quelques arbres se tordent de douleurs tel des pantins désarticulés sous les coups de boutoir des violentes bourrasques. Un parasol en liberté traverse l’avenue du front de mer et quelques poubelles roulent toutes seules. Le typhon est effectivement dans les parages… Un instant je pense à mon vol du lendemain avant de me rendormir.
5h30, réveil avec « du shampoing plein les yeux ». Dehors les éléments semblent s’être un peu calmés, même s’il pleut toujours sans discontinuer sous quelques rafales. Merde, pas possible de sortir courir ce matin. Je me rabats sur quelques exercices d’étirement et de musculation en regardant les informations à la télé. CCTV locale titre sur le typhon qui a léché les cotes Chinoises avant d’aller se déchainer en Corée où les dégâts sont semble t-ils importants. Cette fois-ci même pas mal pour les Chinois. Il faut dire qu’ils ont eu leurs lots de désastres ces dernières semaines suite aux pluies diluviennes dans plusieurs provinces.



9h aéroport de Qingdao : du fait des mauvaises conditions météo une voix criarde répète en boucle que mon vol vers pékins est décalé de 9h55 à 11h50. Du coup pas sûr du tout de pouvoir attraper la connexion pour Paris ! Pas cool mais inutile de s’agacer il n’y rien à faire…

Arrivée à Pékin : juste trente minutes pour le transfert vers la zone internationale. Ca va être très chaud !
Sortie rapide de l’avion en poussant quelque peu les autres passagers Chinois, mais ils ont l’habitude…, puis sprint avec sac à dos et valise à roulettes jusqu’au train automatique vers terminal 3. Par chance les portes se ferment juste derrière moi. Reste à passer la douane. Pourvu qu’il n’y ait pas la queue. Une dizaine de comptoirs sont ouverts. Je vise la file à priori la moins chargée et m’excuse en passant devant tout le monde. Plus que 17 minutes avant le décollage et il me reste encore la sécurité à passer. Même scénario : la file à priori la moins chargée, puis passage devant tout le monde. Il me faut maintenant rejoindre la porte E58. Zut c’est à l’autre bout du terminal qui n’en finit pas. Plus que 14 minutes. Je cours comme un fugitif poursuivi par je sais quel Alien menaçant et aperçois enfin la porte d'embarquement. Plus personne ne semble attendre. En nage, comme un compétiteur arrivant à un point de contrôle je claque mon boarding-pass sur le comptoir sous le regard ahuri de l’agent Air-China. Incrédule il scanne le document. Dans son regard de Ninja, quelque chose ne semble alors pas tourner rond. Je jette un coup d’œil inquiet sur l’écran d’ordinateur ou clignote la mention « delete » (annulé). Je proteste alors fermement en lui demandant s’il reste de la place dans l’avion. Un coup de fil, deux coups de fil, 3 coups de fil puis un bus finit par me prendre. Je suis seul à bord…
Siège 41C (place couloir pour ma grande carcasse) est indiqué sur mon boarding-Pass. En montant l’échelle d’accès à l’Airbus 340 j’ai le pressentiment que le siège est déjà occupé. Pas manqué. Une jeune fille Chinoise est déjà installée, avec le même ticket. Un steward s’enquiert alors de la situation et, fort courtoisement… déplace la jeune fille en 38 E ! J’avoue avoir un peu honte, mais n’ai pas insisté pour me retrouver en milieu de rangée. De toute façon elle avait les jambes bien plus courtes que moi, alors… Bon je sais, c’est pas très classe.

Nous décollons à 14h locale avec un petit de retard. Relax, je suis à bord et normalement dans une 15aine heures à la maison.

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