jeudi 10 août 2017

Les nez au vent : chapitre 2



Voyager sans but est l’opportunité de jouer d’une manière inédite avec l’espace-temps.
Passer d’une époque à l’autre sans se soucier de la cohérence intellectuelle de la démarche, profitant simplement de l’instant présent :
Découvrir à Orléans le labo du CNRS où travaille Lou, notre fils ainé, avec une équipe de doctorants internationaux et multidisciplinaires – sur les moteurs spatiaux à propulsion ionique, préfigurant les futurs voyages interplanétaires – avant de marcher dans la cathédrale millénaire sur les dalles polies par les pas de plus de 40 générations de fidèles. Grand écart étourdissant mais tellement stimulant. 
S’arrêter déjeuner dans une gargote de pêcheurs, éblouis par les flots irisés du fleuve, avec en perspective les panaches de vapeur des tours de refroidissement d’une centrale nucléaire, tandis que, poussé par l’onde tranquille, passe une gabare, bateaux à fond plat typique des bords de Loire. 
Puis dormir dans une cabane sur pilotis, chez une Parisienne reconvertie en apicultrice-chambre d’hôte, descendante d’une guérisseuse recluse dans un taudis au sommet de « la Montagne aux Alouettes ».
Certains y perdraient peut-être leur latin, mais j’avoue que ce type de journée totalement improvisée est assez jouissive, surtout quand on est bien accompagnée comme je le suis.
Alors on y prend goût.

Redémarrer le lendemain par la découverte d’un chantier médiéval où, une véritable entreprise, reconstruit dans les règles de l’art de l’époque, un château fort du XIIème siècle. Le chantier d’une vie lancé il y a déjà 20 ans et dont la fin n’est pas programmée. Le château de Guédelon vaut le détour, comme une immersion dans un passé lointain où les hommes se lançaient déjà des défis techniques. L’essence même du progrès, cette notion dont la remise en cause permanente m’irrite profondément, alors que même si rien n’est évidemment parfait, les Hommes n’ont jamais vécus aussi « bien » et aussi longtemps qu’à notre époque. 
Puis repartir sous les orages pour descendre dans un hôtel propret de Paray-Le-Monial où le sens du service est la raison d’être des gérants de l’établissement, jusqu’à gentiment gronder leur petite fille quand elle ne sourit pas assez aux clients.
Paray Le Monial, de manière forte inattendue pour nous, se retrouvent des pèlerins du monde entier venus ici se recueillir dans la Chapelle de la Visitation, lieu d’une triple apparition supposée du Christ à une religieuse, puis dans la splendide basilique Romane où repose Saint Claude La Colombière. Il ait des lieux comme cela où la spiritualité se concentre, créant, malgré l’omniprésence des marchands du temple, une atmosphère particulière faite de « zenitude » un peu béate, un peu hors du temps aussi, comme si tout le reste n’avait plus vraiment d’importance.
Nous ne faisons que passer, essayant de ne prendre que les bonnes ondes. Et déjà il est temps de reprendre notre déambulation le long de Loire.

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