samedi 12 août 2017

Le nez au vent : chapitre 3



En approchant du Puy-en-Velay, le fleuve devient rivière. Au-delà des monts du Forez, les perspectives ondulantes du Massif-Central, agrémentées de majestueux cônes de volcans en sommeil donnent au paysage des allures de Jurassic Park. Puis la descente sur le Puy, dominée par la statue géante de Notre Dame de France, tel le Corcovado veillant du Rio.
C’est d’ici que partent bon nombre de pèlerins ou simples marcheurs sur les chemins de Compostelle. Et toute la ville respire au rythme de ce rituel séculaire, quasi sacré, magnifié par tous ces lieux de cultes chargés d’histoire construits à la gloire de Dieu. La cathédrale vaut de détour, tout comme une visite à la Vierge rouge aux allures Statut De La Liberté, sans oublier évidemment la Chapelle St Michel d’Aiguilhe au sommet de son piton basaltique. Que n’ont pas fait les hommes pour obtenir l’éternité.

Toujours à la recherche de lieux insolites pour passer la nuit, Flo tombe sur une chambre d’hôte dans une « maison forte » millénaire à quelques kilomètres de la ville.
Anne nous y accueille fièrement. En bordure de Loire, l’histoire raconte qu’elle fut construite avant l’an 1000, pour veiller sur un point de passage du Fleuve par une sorte de bac.
Notre hôtesse ne se fait pas prier pour raconter comment, avec son mari, ils ont racheté cette maison, en réalité un véritable château moyenâgeux, il y a 30 ans de cela. Pour tout dire un véritable sacerdoce au service de vieilles pierres dont le seul intérêt, et pas des moindres, est l’histoire des plus de 40 générations qui y sont passés. Mais l’histoire ne dit pas comment elle entraîna l’évidente ruine économique de ses prioritaires actuels, pour tenter d’empêcher celle de l’édifice…
On y entre par l’unique porte, sur la façade Sud, donnant sur un escalier de pierres rustiques montant en colimaçon vers les 3 étages, dans un courant d’air permanent. L’hiver doit y être glacial. Des mâchicoulis éclairent faiblement l’escalier. Au deuxième palier, une statut de bois à taille humaine de Sainte Anne d’Auray toise les visiteurs de son regard bienveillant. Puis l’on entre dans la chambre, vaste pièce défraichie où trône un lit à baldaquin, tel un alcôve dans un environnement brut d’un autre temps.
7h du matin. Comme des rayons laser, des stries de lumière transpercent les épais rideaux laissant apparaître les particules de poussière millénaires en suspension.
-       As-tu bien dormi me demande Flo.
-       Moyennement. Sans doute tous les esprits qui habitent encore ces lieux.

Nous descendons petit déjeuner dans le salon bibliothèque à l’étage du dessous. Anne nous accueille avec son mari.
Elle, vieille noblesse hors d’âge, dont les évidents talents de peintre s’expriment sur les boiseries de la salle.
Lui, comme sorti d’un d’un vieux bouquin pris au hasard dans les rayons, racontant les épopées Siciliennes de son père, lorsqu’après-guerre ce « franceze » traversait l’Italie à moto pour rejoindre son bateau ancré là-bas…
Tous deux parlant de l’œuvre de leur vie, avec la nostalgie de ceux qui savent être les derniers des mohicans.
Nous, bien dans notre époque, qui ne faisons que passer.




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