vendredi 26 avril 2013

Liberté, liberté chérie



"Cruise control" calé sur 60 miles/h, nous roulons sur le pont rejoignant Virginia Beach à la pointe sud de la presqu'ile du Delaware, long ruban posé sur des piles de bétons régulièrement espacées, construction aux allures de jeu d'enfant s'étirant à perte de vue au dessus des flots scintillants de Chesapeake Bay par un bel après midi de printemps.
Puis la bande d'asphalte plonge dans un tunnel sous les flots, libérant en surface une large ouverture maritime aux nombreux navires transitant vers le fond de la baie où s'abrite la puissante flotte de guerre de l'Atlantique nord de l'US Navy, bref instant de pénombre avant un retour rapide à la lumière obligeant à plisser les yeux.

Depuis 2 jours les rendez-vous s'enchainent dans une organisation parfaite à l'Américaine où convivialité et ponctualité sont deux règles d'or, préambule à l'efficacité d'échanges directs et constructifs. Ici pas de blabla  inutiles, on va droit au but, sans fioritures. Il s'agit de trouver des solutions simples à des problèmes parfois compliqués, en s'efforçant, même si c'est parfois un peu surfait, de rester toujours courtois et positifs.

Tout comme l'Europe de l'Ouest l'Amérique est en crise, mais ce qui frappe ici, c'est l'état d'esprit des Américains. Et je ne parle pas seulement des hommes d'affaire avec qui nous discutons, mais bien des « gens de la rue » comme on dit chez nous avec une insupportable pointe de condescendance.

Ici on ne se plaint pas, on agit avec une vraie détermination pour améliorer sa condition dans un monde qui change, quand chez nous les critiques pleuvent et la contestation s'organisent pour défendre des positions qui ne peuvent plus l’être.
Plus frappant encore, les gens se respectent ; se respectent vraiment. Il n'y a qu'à observer les comportements dans les lieux publics, ou monter dans un avion, pour constater les comportements d'attention aux autres : où l'on n'hésite pas à donner coup de main, laisser la priorité, distiller un compliment gratuit, engager une conversation sur le temps qu’il fait… toutes ces petites attentions qui rendent la vie tellement plus agréable au quotidien.

Quand chez nous on jette un regard suspicieux sur la "réussite", elle agit ici comme un puissant moteur :
-      S'il l'a fait,  je peux le faire aussi !
On admire la réussite et favorise la prise d'initiative. Et aussi étonnant que cela puisse paraître, cela agit aussi dans l'autre sens :
-      S'il est dans la difficulté, cela peut m'arriver aussi. Alors je le respecte et l'encourage.
Aux USA, travail et initiatives restent des valeurs sures et reconnues dont chacun mesure bien les enjeux :
Le travail qui permet, selon les critères économiques classiques, de s'élever socialement en s’engageant d'avantage et différemment s’il le faut, quand chez nous la moindre discussion sur cette notion tellement française des « avantages acquis » devient vite irrationnelle ; comme si le monde ne devait pas changer…
L'initiative individuelle, cette belle notion qui permet d'entreprendre avec agilité, quand en France on croule sous les contraintes administratives d'un état pléthorique qui pense protéger les citoyens en empilant les structures génératrices d'emplois publiques, dont les bénéficiaires, à l’origine de règlements parfois inutiles, réussissent à développer un climat de suspicion sur l'entreprise privée soi-disant responsable de biens des maux de la société. On marche sur la tête et cela devient insupportable !

La nation est aussi un ciment puissant. On aime son Amérique et le fait savoir en arborant fièrement à tous les coins de rue la bannière étoilée. Chacun sait pourquoi il est là et ce qu'il doit au pays : la liberté, la vraie, cette valeur universelle qui permet d'abord de rêver son avenir, puis ensuite d’agir pour le construire.

Je sais, tout cela peut paraitre un peu simpliste, idéaliste voir réactionnaire pour quelqu’un comme moi qui vote traditionnellement à gauche au nom de valeurs de solidarités que nous pourrions bien un jour prochain ne plus être tout simplement en mesure d’assurer, faute d’adaptation à un monde en mutation. Et je sens bien quelques sourires de lecteurs Français que vous êtes peut-être, renvoyant mes arguments au rang de ceux promus par quelques privilégiés capitalistes et individualistes.
Que nenni ! Mais sachons faire preuve d’ouverture et aussi reconnaître nos limites de citoyens du Vieux Continent qui nous enfermons dans des modèles sclérosants, ne plus nous considérer comme les plus vertueux, et regarder ce qu’il y a aussi de bon ailleurs.
L’Amérique n’est pas un monde parfait, loin s’en faut, mais elle continue de cultiver des valeurs que nous sommes en train d’oublier et qui lui permette, j’en suis certain, de rebondir dans le contexte que nous vivons.
Au train où vont les choses les écarts pourraient bien continuer de se creuser entre une société encore tournée vers l’avenir, éprise de liberté et d’idéaux, valorisant l’initiative, et une autre campant sur des positions d’un autre temps.

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