samedi 9 mars 2019

" Nous avons conquis le ciel et la terre ! "


En route vers nos nouvelles installations du Shaanxi (Chine), nous dissertons sur la beauté du monde. Ici l’hiver n’a pas encore quitté la campagne balayée par un vent glacial venant de Mongolie. Tout est gris et poussiéreux. Les villages qui ponctuent ces paysages ruraux semblent comme figés, dans l’attente du réveil de la nature.  Et les habitants vaquent à leurs occupations avec la nonchalance engourdie qui siée à la saison.

Toujours agréable de partager ce type de moment avec un coéquipier entrepreneur partageant les mêmes valeurs. S’effacent alors les différences culturelles pour ne garder que la profondeur de l’âme humaine. Il est alors question du plaisir du moment présent remis en perspective sur la flèche de temps qui passe. Rétrospectives et prospectives se bousculent sur la frise chronologique de notre aventure industrielle. Mélange de satisfactions et de déconvenues, toujours stimulé par cette volonté infaillible de construire quelque chose d’utile et pérenne.
Et viennent alors naturellement les discussions sur ceux qui nous gouvernent. Eux aussi animés par leurs grands desseins. Mais quels peuvent-ils bien être ?
Inévitablement m’arrivent en pleine figure le mouvement de Gilets Jaunes toujours d’actualité chez nous, mais aussi les Débats Citoyens organisés par notre jeune Président.
J’argumente avec conviction sur la vigueur de notre démocratie, même si cela pourrait se passer de manière différente. Notamment ces violences verbales et parfois physiques inutiles qui entachent les discussions et nuisent à l’image de la France.
De son côté, mon amis Chinois développe sur l’absence de démocratie en me comptant une histoire singulière.
Elle concerne un ancien « camarade » de classe revu récemment. Ils se retrouvent après plus de 25 ans et se racontent leurs trajectoires de vie. Moment toujours intéressant. Flash-back sur leurs parcours professionnels et personnels dans un monde qui change. Confrontation d’expériences et de valeurs forgées au long des années.
Mon ami de promouvoir avec enthousiasme sa vie d’entrepreneur faite d’engagements dans un monde où la liberté et le respect de l’autre sont des valeurs fondamentales.
Son ancien camarade issu d’une bonne famille pure produit du système Communiste, père vice-ministre, se considérant comme appartenant à l’élite, attaché aux privilèges qui vont avec.
Et mon ami de lui demander s’il ne serait pas temps de réformer un peu le pays en y injectant un peu de démocratie.
Et l’autre de lui répondre : « Nous avons conquis le ciel et la terre, alors il ne peut être question de partager cela avec les autres ! »
Je demande alors à mon ami si nous ne sommes pas un peu dans la caricature.
Pas du tout me dit-il. C’est comme cela que le système marche ici. Bien sûr que « l’élite » au pouvoir fait avancer certaines choses au service de la population. Bien sûr qu’il faut reconnaître que notre pays s’est formidablement transformé. Mais il en est une chose qu’ils ne lâcheront jamais. C’est Le Pouvoir. Dans les années 60 ils l’ont conquis par la force et la terreur. Ils vont tenter de le garder par le paternalisme et le culte de la personnalité ; et ne le partagerons jamais de leur plein grès. Rappelle-toi que notre Président s’est fait nommer à vie.
Je ne peux alors m’empêcher de replonger dans notre contexte actuel français, et repenser aux allégations de certains leaders d’opinions sur les soi-disant menaces pesant chez nous sur les libertés individuelles.
On marche sur la tête ! Nous avons une chance inouïe de vivre dans ce pays et pourrions sans doute faire mieux ensemble en en étant juste un peu reconnaissant, plutôt que de s’envoyer sans arrêt des invectives.



Aucun commentaire: