En route vers nos nouvelles
installations du Shaanxi (Chine), nous dissertons sur la beauté du monde. Ici l’hiver
n’a pas encore quitté la campagne balayée par un vent glacial venant de Mongolie.
Tout est gris et poussiéreux. Les villages qui ponctuent ces paysages ruraux semblent
comme figés, dans l’attente du réveil de la nature. Et les habitants vaquent à leurs occupations avec
la nonchalance engourdie qui siée à la saison.
Toujours agréable de partager ce type
de moment avec un coéquipier entrepreneur partageant les mêmes valeurs. S’effacent
alors les différences culturelles pour ne garder que la profondeur de l’âme
humaine. Il est alors question du plaisir du moment présent remis en
perspective sur la flèche de temps qui passe. Rétrospectives et prospectives se
bousculent sur la frise chronologique de notre aventure industrielle. Mélange
de satisfactions et de déconvenues, toujours stimulé par cette volonté infaillible
de construire quelque chose d’utile et pérenne.
Et viennent alors naturellement les
discussions sur ceux qui nous gouvernent. Eux aussi animés par leurs grands
desseins. Mais quels peuvent-ils bien être ?
Inévitablement m’arrivent en pleine
figure le mouvement de Gilets Jaunes toujours d’actualité chez nous, mais aussi
les Débats Citoyens organisés par notre jeune Président.
J’argumente avec conviction sur la
vigueur de notre démocratie, même si cela pourrait se passer de manière
différente. Notamment ces violences verbales et parfois physiques inutiles qui
entachent les discussions et nuisent à l’image de la France.
De son côté, mon amis Chinois développe
sur l’absence de démocratie en me comptant une histoire singulière.
Elle concerne un ancien « camarade »
de classe revu récemment. Ils se retrouvent après plus de 25 ans et se racontent
leurs trajectoires de vie. Moment toujours intéressant. Flash-back sur leurs
parcours professionnels et personnels dans un monde qui change. Confrontation d’expériences
et de valeurs forgées au long des années.
Mon ami de promouvoir avec enthousiasme
sa vie d’entrepreneur faite d’engagements dans un monde où la liberté et le
respect de l’autre sont des valeurs fondamentales.
Son ancien camarade issu d’une bonne
famille pure produit du système Communiste, père vice-ministre, se considérant
comme appartenant à l’élite, attaché aux privilèges qui vont avec.
Et mon ami de lui demander s’il ne
serait pas temps de réformer un peu le pays en y injectant un peu de
démocratie.
Et l’autre de lui répondre : « Nous
avons conquis le ciel et la terre, alors il ne peut être question de partager
cela avec les autres ! »
Je demande alors à mon ami si nous ne
sommes pas un peu dans la caricature.
Pas du tout me dit-il. C’est comme cela
que le système marche ici. Bien sûr que « l’élite » au pouvoir fait
avancer certaines choses au service de la population. Bien sûr qu’il faut
reconnaître que notre pays s’est formidablement transformé. Mais il en est une chose
qu’ils ne lâcheront jamais. C’est Le Pouvoir. Dans les années 60 ils l’ont
conquis par la force et la terreur. Ils vont tenter de le garder par le
paternalisme et le culte de la personnalité ; et ne le partagerons jamais
de leur plein grès. Rappelle-toi que notre Président s’est fait nommer à vie.
Je ne peux alors m’empêcher de replonger
dans notre contexte actuel français, et repenser aux allégations de certains
leaders d’opinions sur les soi-disant menaces pesant chez nous sur les libertés
individuelles.
On marche sur la tête ! Nous avons
une chance inouïe de vivre dans ce pays et pourrions sans doute faire mieux ensemble
en en étant juste un peu reconnaissant, plutôt que de s’envoyer sans arrêt des
invectives.
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